Mes chères impertinentes, chers impertinents,

« La Russie veut construire une Eurasie de Lisbonne à Vladivostok »: les déclarations inquiétantes de Dmitri Medvedev titre la Libre Belgique. (source La libre Belgique ici)

« Les récentes déclarations de Dmitri Medvedev, ancien président russe et fidèle allié de Vladimir Poutine, font froid dans le dos.

Dans un message rendu public sur Telegram ce mardi matin et relayé par nos confrères de Het Laatste Nieuws, l’homme d’Etat a tout d’abord démenti les exactions russes commises à Marioupol, et, plus récemment, à Boutcha. Pour rappel, plus de 400 corps sans vie de civils ont été retrouvés gisant à même le sol ou enterrés à la hâte dans des fosses communes. M. Medvedev a qualifié ces atrocités de « fausses », ayant mûri dans « l’imagination cynique de la propagande ukrainienne ».

Ensuite, celui qui a également occupé le poste de Premier ministre entre 2012 et 2020, a réaffirmé les ambitions de la Russie. « Le président russe Vladimir Poutine a fermement fixé l’objectif de démilitarisation et de dénazification de l’Ukraine », a-t-il écrit. « Ces tâches complexes ne se réalisent pas du jour au lendemain, et elles ne se feront pas uniquement sur le champ de bataille », a-t-il encore expliqué. « L’objectif le plus important est de changer la conscience sanglante et pleine de faux mythes qui anime une partie des Ukrainiens d’aujourd’hui. »

Selon l’ancien résident du Kremlin, la Russie ne compte pas s’arrêter à l’invasion de l’Ukraine. « L’objectif est la paix des générations futures d’Ukrainiens eux-mêmes et la possibilité de construire enfin une Eurasie ouverte – de Lisbonne à Vladivostok ».

Des déclarations qui ont rapidement suscité l’effroi de la communauté internationale mais que n’a pas encore publiquement confirmées l’ancien président russe ».

Qu’est-ce qui suscite l’effroi dans de telles déclarations ?

Il est important de poser cette question, car elle engage l’avenir potentiel de centaines de millions « d’Eurasiens », les habitants de l’Europe de Lisbonne à l’Asie de Vladivostok.

Pourquoi serait-on effrayé face à une telle perspective ?

Un bloc « Eurasia » est un évident cauchemar pour la puissance des Etats-Unis, puisque ce continent dispose tout simplement de tout. Des matières premières à la matière grise, « Eurasia » serait indépendante en tout, autosuffisante partout.

C’était d’ailleurs une idée gaulliste puisque c’est bien Charles de Gaulle qui est à l’origine de l’idée de la « Grande Europe » de l’Atlantique à l’Oural – une Europe en paix, sans ligne de partage ni de confrontation entre les blocs.

Personne sur le vieux continent qui est le nôtre ne devrait être opposé à une telle perspective de coopération, de paix et d’unité.

Alors pourquoi un tel « effroi » ?

Il y a plusieurs hypothèses.

La première est que compte tenu de la situation certains interprètent les propos de Medvedev comme une volonté d’unifier par la force et de manière militaire « Eurasia » en envahissant l’Europe de l’Ouest dont nous faisons partie. Dans un tel cas, il est évident que nous serions nombreux à ne pas vouloir « d’Eurasia » ! En gros et si après l’Ukraine la Russie de Poutine envahissait le reste de l’Europe. Cela de vous à moi, semble peu probable. L’armée russe ne ressort pas de son aventure en Ukraine particulièrement glorieuse ni effrayante. Les missiles antichars occidentaux font des merveilles comme le prévoyait la doctrine de l’Otan dans les années 80 avec une stratégie basée sur des essaims de missiles antichars. Idem avec les drones. Les pertes russes sont réelles. Il n’est pas évident que les résultats obtenus par l’armée russe soient désormais dissuasifs. C’est presque militairement contreproductif. En gros le raisonnement est le suivant, si la Russie a autant de mal face à l’Ukraine, elle n’a aucune chance contre l’Europe de l’OTAN militairement parlant tant que l’on reste au niveau conventionnel.

La seconde hypothèse est que la perspective d’une Eurasia unie de l’Atlantique à l’Oural est effrayante… pour les Otaniens et les Américains. Alors cette hypothèse se doit d’être systématiquement combattue et battue en brèche. C’est d’ailleurs ce qu’il se passe avec constance depuis des siècles. La perfide Albion, protégée sur son île au delà des mers a d’ailleurs toujours cherché à diviser ses partenaires continentaux. Les Etats-Unis ont perpétué cette « tradition » anglosaxonne. Jamais, jamais l’unification du continent n’a été possible, et quand il n’y a pas unité, alors il y a guerre, affrontements et massacres.

Il n’y a pas de petite guerre en Europe. Jamais.

« Eurasia », un rêve qui s’éloigne. 

Chaque mort, chaque ville détruite, chaque charnier, chaque sanction, chaque riposte ou contre-riposte sont autant de nouveaux obstacles posés sur le chemin impossible d’une unité, d’une Eurasie de Lisbonne à Vladivostok.

Pourtant, en disant cela, Medvedev vient de vous livrer la vision russe du nouvel ordre mondial.

Et c’est bien cela, encore une fois, qui est en jeu.

C’est la guerre pour la domination du monde.

On domine le monde en fixant les règles du jeu et le cadre des relations. Cela s’appelle à chaque fois « nouvel ordre mondial ». Le monde issu de Yalta était le dernier ordre mondial.

La Russie vient de vous expliquer, de nous expliquer que son ordre mondial alternatif incluait l’Europe de l’Ouest, la Russie et l’Asie (avec la Chine).

Dans cet ordre mondial eurasiatique, il n’y a pas besoin des Etats-Unis, petits pays d’outre mer relégué au rang de puissance secondaire.

Alors quand on y pense bien, c’est effectivement une perspective assez saisissante par ses implications, puisque cela veut dire que c’est bien une guerre mondiale avec un axe sino-russe qui veut unifier « Eurasia » pour couper la tête de pont américaine que représente l’Europe de l’Ouest otanienne.

Et quand on parle de « couper une tête de pont » il y a toujours de quoi être saisi d’effroi, surtout quand la tête c’est nous.

Ne nous leurrons pas.

C’est un combat entre la Chine et la Russie d’un côté, et les Etats-Unis de l’autre.

Au moment de passer à table, c’est l’Europe, nous, qui sommes au menu.

D’ailleurs c’est exactement ce que vient de déclarer Mark Milley, le Chef d’état major de l’armée américaine.

« Nous sommes maintenant confrontés à deux puissances mondiales : la Chine et la Russie, chacune dotée de capacités militaires importantes, qui ont toutes deux l’intention de changer fondamentalement l’ordre mondial actuel basé sur des règles », a ajouté Milley. « Nous entrons dans un monde qui devient de plus en plus instable et le potentiel de conflits internationaux importants augmente au lieu de diminuer. »

Je vous parlerai demain de ce qu’il a dit que l’Europe.

Tic-tac, tic-tac…

Il est déjà trop tard, mais tout n’est pas perdu.

Préparez-vous !

Charles SANNAT

« Insolentiae » signifie « impertinence » en latin
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