Jim Rickards, un ancien des “services secrets” américains, est la nouvelle coqueluche – et aussi le “produit” phare des Chroniques Agora – partout à travers le monde. Personnellement, je préférais les lettres peut-être plus franco-françaises et plus confidentielles, mais bon, je préférais aussi le franc, le papier et le crayon pour écrire que l’ordinateur… Je sais, parfois, je me dis que je suis vieux… Et lorsque je me vois dans le regard de mes enfants, je me dis que je le suis vraiment !
Enfin, je ne voulais pas vous parler du temps qui passe mais du dernier papier de Jim Rickards sur les politiques monétaires à venir, article qui vient justement compléter l’édito d’aujourd’hui consacré aux taux négatifs envisagés par la FED au lieu d’un nouveau QE !
Il n’évoque pas les taux négatifs et son scénario semble être une monétisation de la dette avec déficit budgétaire couvert par la banque centrale qui achète les obligations du trésor… Je suis sceptique sur cette formule et je privilégie le scénario évoqué aujourd’hui de taux négatifs.
Cela n’empêchera pas qu’au bout du compte, il y aura peut être les deux !
Charles SANNAT
Article de Jim Rickards, publié le 17 février 2016 sur Daily Reckoning :
« J’estime à 76 % les chances que nous soyons dans la phase préliminaire d’une récession. Tous les signes de l’économie américaine sont négatifs.
Le comportement actuel des marchés actions est également conforme à celui auquel je m’attends durant le début d’une récession. Ils sont l’un des signes avant-coureurs d’une récession : celle-ci démarre souvent après 6 mois de baisse des marchés.
Les économistes mainstream prennent du temps à s’en rendre compte. Dans un an, ils diront que la récession a démarré en janvier ou en février 2016. Une information devenue inutile à ce stade des choses. Il est pourtant possible d’anticiper en regardant là où il faut.
Par exemple, les salaires réels n’évoluent pas. D’autres indicateurs clés, comme le commerce mondial, la baisse de la production industrielle, les ratios inventaires/ventes et les ventes d’automobiles suggèrent également que nous sommes sur le point d’entrer en récession.
Les forces déflationnistes restent fortes, rendant l’objectif de production d’inflation de la Fed encore plus urgent. Chaque trimestre qui passe rapproche les élites mondiales du jour fatidique. Elles ont absolument besoin d’inflation pour se sortir du problème de la dette souveraine.
Pourtant, les banques centrales n’ont toujours pas réussi à générer l’inflation qu’elle pense nécessaire pour restaurer la croissance mondiale. Aux États-Unis, durant ces 7 dernières années et malgré les QE1, QE2 et QE3, la Fed a été incapable d’atteindre ses objectifs d’inflation. Tout comme la BCE ainsi que la Chine.
La question que doivent se poser les élites est : d’où viendra cette inflation ?
Beaucoup de gens pensent qu’il suffit de créer de la monnaie pour générer de l’inflation. C’est ce que Milton Friedman affirmait. Mais c’est faux, cela ne suffit pas. Les gens doivent faire quelque chose de cet argent créé. Il doit être emprunté, dépensé ou investi. Les banques doivent prêter ou investir dans des projets. Cet argent ne peut être inactif.
Pour créer de l’inflation, la création monétaire ne fait que 50 % du travail. L’autre moitié, c’est prêter cet argent… Le dépenser… L’utiliser pour accorder des crédits, etc. Ce qui n’a pas eu lieu.
Cela n’a pas eu lieu car les décideurs des banques et des entreprises pansent toujours leurs plaies de l’effondrement de 2008. Les citoyens lambda se sont attelés à rembourser leurs dettes et à épargner. C’est pourquoi nous sommes toujours dans un cycle de leverage de la dette. C’est aussi pourquoi les assouplissements quantitatifs ont échoué. L’argent n’a pas atteint l’économie réelle, il est resté circonscrit dans le secteur bancaire.
Les banques qui disposent de réserves excédentaires à la Fed pourraient les utiliser pour prêter. Elles ne le font pas, donc ça ne peut pas marcher. Ce qu’on appelle le mécanisme de transmission monétaire est cassé. (…)
Comment y remédier ? Avec les hélicoptères monétaires, qui bombarderont d’argent directement le gouvernement pour stimuler l’économie vu que le secteur privé ne le fait pas. (…)
Cette tactique nous ramène à la Grande Dépression et à Keynes. Il disait que les dépenses gouvernementales pouvaient sortir une économie de la dépression. C’est l’ABC du keynésianisme. L’idée est simple : lorsque le gouvernement dépense, c’est toute l’économie qui repart. D’après ce principe, l’objet des dépenses n’a même aucune importance. Les élites dans leur majorité pensent que c’est vrai.
Bien sûr, le gouvernement n’aura aucun problème à dépenser cet argent. Les Démocrates l’utiliseront probablement pour des programmes sociaux tandis que les Républicains augmenteront le budget militaire. Chacun a ses préférences en la matière. (…)
Mais quelle est la différence entre un assouplissement quantitatif et les hélicoptères monétaires ? Dans un QE, la Fed crée l’argent et l’utilise pour acheter des obligations existantes aux banques. Ensuite, l’argent reste souvent parqué dans les banques, j’ai déjà expliqué l’échec de cette politique.
Avec les hélicoptères monétaires, cependant, le Congrès dépense l’argent. Le déficit budgétaire est couvert par les emprunts tandis que la Fed crée l’argent nécessaire pour les couvrir. Simplement dit, il s’agit de monétisation de la dette. Alors qu’avec un QE la création monétaire ne générait pas davantage de dépenses, ce n’est pas le cas avec les hélicoptères monétaires.
En bout de course, cela signifie qu’il s’agit de la recette pour obtenir de l’inflation. Et nous allons y goûter plus vite que vous le pensez… »
Jim Rickards