C’est un article très pertinent de la non moins pertinente Myret Zaki du magazine Bilan en Suisse revenant sur le titre du magazine Time qui proclame la victoire de la Chine, ou plus précisément du modèle chinois, qui mélange savamment efficacité, absence de droit social, libéralisme débridé mais aussi dictature politique et liberté d’entreprendre avec l’autorisation de parti.

La Chine a effectivement inventé le modèle économique totalitaire le plus efficace économiquement uniquement parce que nous avons eu la stupidité de la laisser envahir nos pays avec ses produits alors qu’il suffirait d’avoir quelques droits de douane comme c’était le cas avant pour être préservés des mains voraces de nos amis chinois.

Bref, la Chine a gagné parce que nous nous laissons distancer et nous acceptons la défaite.

Plus inquiétant, sous prétexte de concurrencer la Chine, nous devenons nous-même des dictatures politiques, sans droit social et avec une baisse des salaires pour nous ajuster sur le « standard » chinois.

C’est une catastrophe pour la démocratie telle que nous l’avons connue qui se meurt sous vos yeux remplis de larmes.

Charles SANNAT

« Ce n’est rien de moins que le titre de couverture de l’influent magazine Time de novembre. Suivi d’un point final. L’article intérieur établit la supériorité d’une économie où les décisions sont centralisées et incontestées, où l’État et ses banques viennent en soutien direct aux entreprises publiques et privées. Il voit le risque que l’empire du Milieu, devenu le plus puissant acteur de l’économie globale, occupe seul le devant de la scène internationale, profitant du retranchement de l’Amérique de Donald Trump.

Tout en reconnaissant le déficit démocratique du modèle, on ne peut qu’être d’accord avec Time, dans le sens où c’est le modèle chinois qui semble avoir gagné la partie. En effet, le capitalisme d’État se propage de par le monde, adopté par des puissances qui comptent, pour le meilleur et pour le pire.

D’abord avec la Russie de Vladimir Poutine, qui s’est muée en modèle fortement centralisé depuis la purge menée par l’homme fort de Moscou contre les influents oligarques du pétrole et des matières premières, puis avec son arrivée en force sur la scène internationale. Sa vision géostratégique eurasienne s’inspire d’une notion de zone d’influence comparable à la vision de la « Route de la soie » chinoise. On voit aussi l’Inde et la Turquie s’inscrire dans ce modèle d’économie dirigée.

À présent arrive l’Arabie saoudite. Riyad, qui s’est rapproché de Pékin en mars au gré de 65 milliards de dollars de contrats de coopération, voit des intérêts avec Moscou via une diplomatie pétrolière commune et pour négocier un compromis autour de la Syrie. Le nouveau leader saoudien, autoritaire, centralisateur, est déterminé à reprendre le contrôle des fleurons de l’économie. Ce qui se dessine à la tête du royaume wahhabite, depuis l’arrestation des 11 princes, est une redéfinition du contrat entre politique et économie vers un contrôle accru de la première sur la seconde.

Une centralisation à marche forcée pour une économie qui n’a peut-être pas le choix, en raison du risque de faillite qu’encourt la maison des Saoud, ruinée par les faibles prix du pétrole et le coût de la paix sociale visant à calmer les esprits pour prévenir des soulèvements populaires. Le prince Mohammed ben Salmane, successeur désigné de son père le roi Salmane, qui supervisera l’allocation future des 100 milliards de dollars issus de l’entrée en bourse des 5 % du géant pétrolier étatique Aramco, semble déterminé à gouverner de plus en plus seul, tout en écartant les puissants émirs rivaux. Cela rappelle étrangement la chasse de Poutine contre les oligarques qui avaient acquis un pouvoir démesuré.

De même que la Chine a d’abord promulgué sa loi «anticorruption», puis décidé de limiter fortement les investissements de ses ressortissants à l’étranger, afin d’orienter les capitaux chinois vers le marché domestique, de même l’Arabie a lancé son opération «anticorruption» et semble décidée à rediriger vers le pays les milliards disséminés par ses princes milliardaires partout dans le monde, qui bénéficient à tout sauf à l’économie saoudienne. Un nouveau patriotisme qui promet de s’exercer avec poigne.

Le mimétisme a changé de camp

La nouvelle prédominance du modèle de capitalisme centralisé met à mal la vision occidentale selon laquelle toutes ces économies émergentes auraient fatalement dû embrasser la démocratie libérale, entamer des « réformes de marché », « ouvrir » leur économie, faire évoluer leurs institutions vers un modèle multipartite. En réalité, le capitalisme d’État, dans lequel la puissance politique est doublée de celle de l’économie, est celui qui est imité par des puissances occidentales, qui défendent plus ouvertement que jamais leurs intérêts nationaux. »

Source Bilan.ch ici

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