Mes chères impertinentes, chers impertinents,
Dès le mois d’octobre 2022, j’alertais mes lecteurs des risques qui allaient peser sur l’un des placements devenus les plus appréciés de nos concitoyens à savoir les fonds immobiliers et autres sicav immobilières qu’il suffisait de mettre dans ses contrats d’assurance-vie pour améliorer le rendement global et éviter les fonds en euros devenus totalement neurasthéniques avec les 10 années que nous venions de vivre de taux 0 ou même négatifs.
Le 2 novembre 2022 je publiais un dossier stratégies pour mes abonnés intitulé “Alerte Rouge sur la liquidité des SCPI et la solution ultime pour se protéger”.
Ce n’était ni pour faire peur, ni pour inquiéter, mais comme vous le savez, si je sais lire l’avenir c’est grâce à mes poules de cristal et à mes trois petits singes de la sagesse. Non. Inutile ici en réalité de convoquer des capacités de voyance. Les capacités analytiques suffisent à anticiper et comprendre ce qu’il va se passer avec plusieurs mois d’avance à condition d’aller toujours jusqu’au bout des raisonnements et de ne pas s’arrêter au milieu du gué pour être politiquement correct et cela nécessite d’éliminer au maximum les biais de raisonnement. Je reviendrais un jour sur cette notion de biais de raisonnement. C’est passionnant.
J’avais reçu d’ailleurs à l’époque comme à chaque fois, quelques messages forts peu sympathiques m’expliquant que je disais que des âneries ou que j’étais “pessimiste”. Je ne suis pas pessimiste ! J’adore faire la fête et plein de projets, mais il faut toujours voir les choses telles qu’elles sont, pas comme nous souhaiterions qu’elles soient.
Alors ceux qui pensaient que je me trompais, pourront apprécier à sa juste valeur l’analyse parfaitement officielle, mais arrivant 6 mois après la mienne de la… BCE, la Banque centrale européenne, qui met en garde contre les risques qui pèsent sur les fonds… immobiliers.
Voici quelques extraits du dernier bulletin macro prudentiel de la BCE (source ici)
Rien que le titre du dossier de la BCE est un programme en soi !
“Le rôle croissant des fonds d’investissement sur les marchés immobiliers de la zone euro : risques et considérations politiques”
Dès le départ, c’est un festival, qui pose, très justement les problèmes de liquidité !
“Cet article analyse les risques pour la stabilité financière des fonds d’investissement actifs sur les marchés de l’immobilier commercial de la zone euro. Il constate que les fonds d’investissement immobilier (REIF) ont connu une croissance significative au cours de la dernière décennie et qu’ils sont très présents sur le marché dans plusieurs pays de la zone euro où les perspectives des marchés de l’immobilier commercial se sont fortement détériorées. En outre, les fonds d’investissement immobilier sont exposés au risque de liquidité lorsqu’ils offrent des remboursements fréquents, ce qui pourrait affecter la stabilité des marchés de l’immobilier résidentiel. Les FPI devraient donc être soumis à un cadre politique commun et complet afin de réduire l’asymétrie de liquidité et les risques pour la stabilité financière.
Les fonds immobiliers ouverts sont vulnérables aux rachats en raison de l’asymétrie de liquidité structurelle entre leurs actifs et leurs passifs, ce qui, avec leur importance pour les marchés de l’immobilier de la zone euro, souligne la nécessité d’un cadre politique commun et complet pour les fonds immobiliers. Ces fonds sont sujets à un décalage structurel de liquidité lorsqu’ils offrent des remboursements fréquents à leurs investisseurs tout en détenant des actifs immobiliers illiquides. Les politiques visant à réduire la vulnérabilité due à l’asymétrie de liquidité devraient inclure une utilisation plus active des fonds de placement immobilier, ainsi que des mesures directes axées à la fois sur l’actif et le passif des fonds d’investissement immobiliers. La section 2 de cet article examine l’importance des fonds immobiliers sur les marchés de l’immobilier résidentiel de la zone euro. La section 3 traite des tensions sur le marché de la construction immobilière, tandis que la section 4 examine comment ces tensions pourraient être amplifiées par les vulnérabilités des fonds d’investissement immobiliers. La section 5 traite de la nécessité d’améliorer la résilience des fonds d’investissement immobiliers.
Les marchés immobiliers présentent des signes évidents de vulnérabilité, notamment une baisse de la liquidité du marché et des corrections de prix, principalement dues à l’incertitude des perspectives macrofinancières et au resserrement monétaire.
La possibilité que l’incertitude du marché immobiliers affecte les fonds immobiliers a été mise en évidence par les récents événements de crise en dehors de la zone euro. Aux États-Unis, Blackstone Real Estate Income Trust (BREIT) a récemment connu une augmentation des demandes de rachat, principalement de la part d’investisseurs asiatiques. En conséquence, BREIT a dû limiter les rachats conformément à ses propres limites de retrait, entreprendre des ventes immobilières substantielles et rechercher de nouveaux investissements pour atténuer les pressions sur les liquidités.
De même, au Royaume-Uni, de nombreux REIF ont imposé des barrières de rachat à la suite d’une augmentation des demandes de rachat déclenchée initialement par la tourmente des gilts et plus récemment par l’incertitude macrofinancière et les perspectives négatives du marché des CRE.
Les chocs antérieurs ont également montré que les fonds immobiliers de la zone euro sont exposés à des risques de liquidité importants, de sorte que toute détérioration des marchés immobiliers pourrait être amplifiée dans le secteur des fonds immobiliers. Grill et al. (2022) constatent que les fonds immobiliers à capital variable étaient plus susceptibles que les autres catégories de fonds de suspendre les rachats après le début de la pandémie de coronavirus (COVID-19). Cela s’explique en grande partie par le fait qu’il est difficile d’évaluer et de vendre avec précision des actifs immobiliers illiquides pendant les périodes de crise, ce qui peut augmenter la probabilité de panique des investisseurs. De même, toute détérioration des conditions actuelles du marché immobilier peut également augmenter le potentiel de demandes de remboursement importantes. Si des outils de gestion des liquidités (LMT) appropriés ne sont pas en place, les fonds immobiliers pourraient avoir à recourir à des ventes en catastrophe d’actifs, amplifiant ainsi les tensions sur le marché. Par conséquent, nous nous concentrons dans cet article sur les vulnérabilités de liquidité des fonds immobiliers ouverts.
Le rôle des fonds immobiliers sur les marchés immobiliers de la zone euro
Les fonds immobiliers de la zone euro ont considérablement augmenté au cours de la dernière décennie. La valeur liquidative (ANR) des fonds immobiliers a plus que triplé entre le quatrième trimestre 2012 et le quatrième trimestre 2022, passant de 323 milliards d’euros à 1 040 milliards d’euros (graphique 1, partie a). Les fonds immobiliers ouverts représentent 80 %, soit 835 milliards d’euros, de la valeur liquidative de l’ensemble des REIF (fonds immobiliers). Ces fonds sont principalement localisés dans cinq pays (Allemagne, Luxembourg, France, Pays-Bas et Italie), qui représentent l’essentiel de la croissance du secteur.”
Voilà je m’arrête là, vous avez compris l’idée générale.
1/ Les fonds immobiliers dits REIF ont une capitalisation qui est passée de 323 milliards à plus de 1 040 milliards ce qui devient bougrement significatif, surtout pour ceux qui ont mis leurs assurances-vie en fonds immobiliers ces dernières années pour aller chercher du rendement.
2/ La crise immobilière va faire baisser la valeur de tous les actifs immobiliers notamment commerciaux. Cette crise immobilière est pluri-factorielle, changement d’usage avec le télétravail pour les SCPI de bureaux, hausse des taux tellement forte que les prix se réajustent aux nouvelles conditions de financement, et enfin, transition écologique et énergétique nécessitant des travaux de mise aux normes importants.
3/ Nombreux sont ceux qui ont acheté en même temps des fonds immobiliers. Nombreux sont ceux qui vont vouloir en sortir simultanément quand ils vont comprendre que ce placement peut s’avérer problématique pour les mois à venir. Problème, l’immobilier n’est pas liquide et si les nouveaux entrants ne sont pas plus nombreux que les sortants, alors se pose immédiatement un problème de liquidité car il faut vendre de l’immobilier en pleine crise.
Cela est toujours faisable.
Mais soyons clair.
Vendre un actif immobilier pendant une crise immobilière cela veut dire plus brader que vendre… il faut donc constater des moins-values. Dit plus clairement des pertes.
D’où la notion de gel de votre épargne en attendant des jours meilleurs, ce qui est effectivement pas une mauvaise en soi. C’est juste que vous n’avez plus accès à vos sous. Toujours ennuyeux et inconfortable surtout si on en a besoin.
La crise des taux entraînent plusieurs problèmes.
Ce que j’essaie de vous expliquer et d’expliquer au plus grand nombre depuis des mois, c’est que la hausse des taux a forcément des conséquences. Agréables pour l’épargnant dont les dépôts sont rémunérés de plus en plus fortement sans rien faire. Désagréables quand on parle de bourse, d’actions, d’obligations qui chutent, ou d’immobilier qui corrige, sans oublier… les problèmes de liquidités. Tous ces problèmes fragilisent les banques et donc menacent la sécurité de vos dépôts.
C’est pour cette raison que je vous parle d’un côté de liquidité sur les actifs, et de sécurisation de vos dépôts bancaires !
Si vous avez un peu d’argent placé, si vous avez quelques dizaines milliers d’euros à protéger et que vous souhaitez aussi idéalement faire fructifier, ce qui est aussi le but, même dans un période incertaine, alors, rejoignez notre aimable communauté des Stratégistes. Pour 98 euros seulement, vous aurez accès à plus de 90 dossiers et aux 12 prochains mois pendant lesquels je vous accompagnerai dans ces eaux troubles, avec un objectif, vous aider à protéger votre épargne en ayant toujours plusieurs mois d’avance sur les évènements pour vous permettre d’anticiper. Tous les renseignements pour vous abonner sont ici.
Il est déjà trop tard, mais tout n’est pas perdu.
Préparez-vous !
Charles SANNAT
« Insolentiae » signifie « impertinence » en latin
Pour m’écrire [email protected]
Pour écrire à ma femme [email protected]
« À vouloir étouffer les révolutions pacifiques, on rend inévitables les révolutions violentes » (JFK)
« Ceci est un article ‘presslib’, c’est-à-dire libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Insolentiae.com est le site sur lequel Charles Sannat s’exprime quotidiennement et livre un décryptage impertinent et sans concession de l’actualité économique. Merci de visiter mon site. Vous pouvez vous abonner gratuitement à la lettre d’information quotidienne sur www.insolentiae.com. »
– Après des parkings, les box, les locations meublées, les AirBnB, les locations nues, les bureaux high tech partagés, les résidences Séniors …il faudrait que l’on comprenne que l’immobilier ne doit pas suivre les modes (…qui se démoderont et génèreront des pertes) !
– On parle de 20/30 ans. On parle de sécurité, de sa retraite…
– Il reste aujourd’hui la seule vraie solution de plus-value à travers la construction à 100% (villa, pavillon, sur un terrain à bâtir…) Il y a des risques (couvert par l’Assurances, la Décennale, la Dommages Ouvrage au travers des contrats CCMI) Cela demande du temps, du suivi, … mais toute plus-value doit émaner d’un travail …
Cher Charles , ne vous inquiétez pas si quelqu’un vous taxe de pessimiste…ne effet un adage allemand dit qu’un pessimiste est un optimiste “avec expérience” :”ein Optimist mit Erfahrung”
Robert , Kembs
Bonjour Charles, votre ménagerie du grenier a bien mérité son oeuf en chocolat !
Joyeuses Pâques à tous.
Petit anecdote immobilière qui touche directement ma famille : une commune du littoral vient de décider d’augmenter les taxes foncières d’une zone commerciale implantée sur le domaine maritime (c’est une catégorie spéciale) de 11 fois son montant. Pour notre petit emplacement, ça va représenter 40% du loyer annuel que nous allons devoir reverser à l’administration au lieu de quelques jours aujourd’hui. A l’échelle de cette zone sur laquelle on se doutait que la mairie avait des projets, c’est quasiment une expropriation déguisée. Le courrier de notification est, comme il se doit, rédigé dans un style agressif indiquant déjà les rétorsions auxquelles on s’exposerait en n’obtérant pas dès la prochaine échéance et à quel point un recours quelconque serait inutile. Quand c’était un complément de retraite sur lequel on comptait, c’est très perturbant pour rester modéré. En tout cas, c’est un exemple de plus de casse de la classe moyenne.
Comme je le disais au responsable du secteur commercial d’une grande banque nationale en 1974 “C’est bien joli d’investir dans des SCPI, ça répartit les risques, mais toutes baissent en même temps, on n’est pas plus avancé.”
J’avais d’ailleurs porté plainte contre une filiale de cette banque, qui avait écrit “Vous êtes COMME propriétaire …”
“Alors ceux qui pensaient que je me trompais”, vous ne vous trompiez pas vous étiez complotiste
Rappel : Un complotiste est une personne qui donne la bonne information un an avant les autres.
“Les marchés immobiliers présentent des signes évidents de vulnérabilité, notamment une baisse de la liquidité du marché et des corrections de prix, principalement dues à l’incertitude des perspectives macrofinancières et au resserrement monétaire”
En résumé pour ceux qui ne comprennent pas le jargon administratif : Il n’y a plus de sous !
“le gel de votre épargne en attendant des jours meilleurs, ce qui est effectivement pas mauvais en soi”
Variante de Il n’y a plus de sous avec deux précisions :
1) Il n’est pas sûr que les jours deviennent meilleurs et que les fonds placés seront à la même valeur lorsqu’ils seront revendus (ce n’est jamais à la hausse …)
2) Le mouvement de panique est assuré lorsque les pigeons verront qu’ils sont pigeonnés va accentuer le phénomène.
Maintenant l’étape suivante est l’assurance vie en euros adossée sur des emprunts à taux fixe, là cela va vraiment être intéressant à voir car s’il y a une certitude c’est que les emprunts en contrepartie n’évolueront pas à la hausse et si l’on attend l’échéance des emprunts, l’hyper inflation aura tout laminé.
Une “fausse épidémie” ou une “guerre” ou une “crise écologique ” ou (non pas la couche d’ozone, cela a déjà servi) ou ??? essayera de masquer la crise et les “gros riches” qui ont de l’assurance-vie et qui voudront retirer leur argent (gagné comment demanderont les journalistes stipendiés du système !!!) servira à détourner l’attention des moutons.
A suivre.
J’ ai suivi vos conseils, cher Charles, en liquidant mes SCPI de bureaux et commerces.
Je conserve Pierval Santé, une SCPI de cliniques et maisons de retraite. Je ne désespère pas totalement…
Bien à vous.
Immo papier, or papier, même pq….
Bel article, un peu alarmiste surement car le vrai sujet porte sur le risque de la liquidité plus que du support en lui même.
Tout investisseur dans ce domaine sait que l’immobilier est cyclique et chaque cycle peut s’étaler sur plusieurs années.
Ceci dit je note que :
– Les scpi de bureaux restent résiliente après 3 années de covid et la soi-disant “révolution du télétravail”. On observe plutôt un retour des employés au bureau.
– Les scpi sont peu exposées (directement) aux taux de crédit, leur endettement moyen est de 17%.
– Les frais d’entrée et de sortie sont dissuasif pour les investisseurs de courte durée. Dès lors, l’horizon de ces investisseurs se compte en années, 8 à 10 ans en moyenne. Le risque de sortie massive reste théorique.
– L’AMF, et tous les associés avisés de ces SCPI , veillent au grain. Il existe déjà, dans la pratique, un nombre important de garde fous permettant de limiter les sorties massive en un temps court. C’est clairement indiqué dans les bulletins de souscription.
Enfin, si ce rapport entraine quelques règles de sécurité supplémentaire, ou quelques contraintes sur la liquidité permettant une meilleure stabilité du marché, c’est positif :
L’investissement ‘immobilier (en direct ou en SCPI) est illiquide par nature et ré-affirmer cette règle pour les investisseurs à la petite semaine me parait etre une bonne chose.
Merci pour vos articles Charles
bonne journée à vous