Mes chères impertinentes, mes chers impertinents,

Je vous reproduis ci-dessous l’interview à l’agence Sputnik à laquelle j’ai participé avec mon camarade Philippe Béchade et consacrée au sujet d’une alliance entre la Chine et l’Union européenne, c’est-à-dire ce qu’il reste du monde dit… “libre-échangiste”.

La question était de savoir si la politique de démondialisation menée par Trump et l’unilatéralité des politiques américaines allaient pousser à de nouvelles alliances.

Comme vous l’avez sans doute compris, enfin pour ceux qui me lisent régulièrement, je ne suis pas franchement un grand admirateur des politiques américaines qui consistent à apporter la démocratie partout où l’oncle Sam le souhaite à coups de grand renfort de bombardements et de missiles.

Logiquement, quand on constate à quel point les Etats-Unis sont hégémoniques, la manière dont ils sanctionnent à répétition nos entreprises, et les pressions qu’ils peuvent exercer sur leurs “partenaires” et “alliés”, il est évident que le fait de nouer de nouvelles alliances devrait traverser tous les esprits sains de cette planète.

Il est également une logique géographique qui consiste en l’unité du continent eurasiatique qui est un continuum, et je peux aller de Paris à Pékin en voiture… ou à pieds ! Une alliance Union européenne, Russie, Chine en incluant l’Inde dans cet immense ensemble aura beaucoup de sens et permettrait d’avoir un bloc d’une puissance telle que les Américains ne pourraient pas lutter ou imposer leur vue de la même façon.

Ils seraient obligés au multilatéralisme.

Aussi séduisante que cette idée puisse paraître, elle est pour le moment totalement prématurée pour la simple et bonne raison que l’Europe reste profondément et totalement inféodée aux Etats-Unis. L’Europe reste “otanisée” jusqu’au bout des ongles.

Nos élites sont également très profondément liées aux Etats-Unis et aucun “serviteur” européen de l’Empire américain ne trahira ses maîtres à Washington, bien que cela soit nettement moins vrai avec l’arrivée de Trump au pouvoir.

Les mondialistes européens se sentent un peu seuls, mais pas suffisamment pour se passer pour le moment de l’encombrante tutelle américaine et de l’alliance militaire de l’OTAN.

Le processus de démondialisation va prendre du temps et Trump fera tout ce qu’il faut pour mettre au pouvoir de nouveaux dirigeants en Europe qui soient plus nationalistes, moins mondialistes et qui restent alliés aux Etats-Unis contre plus d’indépendance vis-à-vis de l’Union européenne.

Cela va prendre un peu de temps encore et comme tout processus, il n’y a rien d’immédiat, mais un fonctionnement itératif des choses.

Au bout du compte, nous ne nous allierons vraisemblablement pas avec la Chine.

Voici l’article.

Alliance économique Chine-UE contre les États-Unis ? Non, mais…

“Alors qu’un important sommet sino-européen se tiendra les 16 et 17 juillet à Pékin, la Chine fait pression sur l’Union européenne afin d’unir commercialement les deux blocs contre l’Amérique de Trump. Bruxelles refuse… pour le moment. Deux économistes décryptent pour Sputnik cette tentative chinoise de rebattre les cartes.

C’est une alliance qui bouleverserait l’équilibre du monde. À quelques jours d’un sommet entre représentants de l’Union européenne et de la Chine, Reuters a recueilli plusieurs témoignages d’officiels des deux parties. Liu He, vice-Premier ministre de l’empire du Milieu et son collègue conseiller d’État Wang Yi ont exhorté Bruxelles à passer à l’action contre Washington sur le terrain du commerce international. Même l’agence de presse officielle Xinhua a été mise à contribution : elle a indiqué le 4 juillet 2018 que les deux blocs «devraient résister main dans la main au protectionnisme», visant directement les déclarations de Donald Trump.

Ce dernier s’apprête à annoncer une importante augmentation des tarifs douaniers pour les produits en provenance de Chine. Au total, ce sont 50 milliards de dollars d’importations chinoises annuelles qui seront affectées par les mesures américaines. Pékin a d’ores et déjà prévu de répliquer à l’identique en frappant elle aussi un total de 50 milliards de dollars d’importations américaines. «La Chine ne cédera pas à la menace ni au chantage», a assuré le 5 juillet le porte-parole du ministère chinois du Commerce, Gao Feng.
C’est dans ce contexte tendu que la Chine se cherche un allié de poids. Et pour convaincre Bruxelles, Pékin assure être prêt à aller vers plus d’ouverture de son marché pour les Européens. Mais pour le moment, ces derniers restent sourds aux chants des sirènes chinoises. «La Chine veut que l’Union européenne se place du côté de Pékin contre Washington. Nous ne le ferons pas et nous devons leur dire», a déclaré un diplomate européen à Reuters.

​Philippe Béchade, intervenant régulier sur BFM Business et président des Éconoclastes a livré son analyse à Sputnik. Il ne s’attend pas à une alliance sino-européenne, du moins pas tout de suite.

«Imaginez que les Européens se mettent à discuter sérieusement avec la Chine. Ils ne seraient plus les alliés des États-Unis. C’est impensable. Les deux blocs sont bien trop différents. Les Chinois ne sont pas nos amis sur le plan économique. Nous sommes même souvent rivaux. De plus, les systèmes de gouvernance sont totalement opposés. Politiquement, c’est intenable.»

Une analyse que conforte Charles Sannat, diplômé du Centre d’études diplomatiques et stratégiques, ex-directeur des études économiques d’Aucoffre.com et auteur du blog Insolentiae.com, qui s’est également confié à Sputnik.

«Il est prématuré d’envisager une alliance entre une Union européenne profondément otanisée et une Chine alliée de la Russie.»

Une véritable alliance commerciale entre la Chine et l’Europe semble donc irréaliste à l’heure actuelle. Mais quid du futur ? Charles Sannat ne l’exclut pas à l’avenir :

«Aucun grand changement ne peut se faire du jour au lendemain. On constate aujourd’hui une perte de vitesse des mondialistes depuis l’élection de Donald Trump qui, s’il souhaite garder le leadership américain, refuse d’aller vers ce monde globalisé.»

Philippe Béchade parle, quant à lui, de possibles futurs ajustements plus que d’une coalition :

«Certains dirigeants occidentaux, Angela Merkel en tête, ont clairement exprimé leur souhait de ne pas se laisser faire par Donald Trump. En cas d’attaques américaines sur le front du commerce international, on pourrait assister à des mesures coordonnées entre Chine et Europe. Mais de là à parler d’union.»

Cette volonté pressante de la Chine serait-elle motivée par les menaces protectionnistes du locataire de la Maison Blanche à destination de la Chine ?

​Pour Charles Sannat, ce n’est clairement pas le cas. «Je ne pense pas que la Chine soit inquiète. Il s’agit d’une manœuvre logique et normale pour eux. Si la Chine ne peut plus commercer aussi facilement avec les États-Unis, elle tentera d’aller vers d’autres partenaires. Il faut bien avoir en tête que le principal partenaire commercial de Pékin est l’Europe occidentale.» Pour l’économiste, Pékin se positionne sur le long terme, une vision que l’UE ne partage pas à ce jour:

«Les Chinois souhaitent résister à ce choc de démondialisation voulu par les États-Unis en nouant de nouveaux partenariats. Mais encore faut-il que les Européens soient d’accord. Ce qui est plus compliqué.»

Ce qui est sûr, c’est que les débats des 16 et 17 juillet seront conditionnés par les prochaines annonces du locataire de la Maison-Blanche. Et concernant la Chine, cela devrait se faire dès le 6 juillet.”

Il est déjà trop tard, mais tout n’est pas perdu. Préparez-vous !

Charles SANNAT

« Insolentiae » signifie « impertinence » en latin
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