Mes chères impertinentes, chers impertinents,

La formule « ultima ratio regum » était l’expression favorite du cardinal de Richelieu. Le Roi Louis XIV reprit cette formule à son compte et la fit apposer sur ses canons.

Cette locution latine ultima ratio regum, peut se traduire littéralement, par « La force est le dernier argument des rois » (du latin ultima : dernier ; ratio : raison, argument et regum : des rois).

Cette expression signifie que, lorsque tous les recours pacifiques et diplomatiques ont été épuisés et qu’il ne reste plus aucune solution raisonnable, on peut se résigner à utiliser la force pour imposer ses vues.

C’est exactement ce que Poutine a fait le mois dernier en envahissant l’Ukraine. Je n’ai pas ici de position morale, je constate que la partie russe pensait que la chance avait été laissée à la diplomatie et qu’il n’était plus temps de demander permission. Poutine est le méchant d’aujourd’hui. Pourtant, il est largement envisageable, que demain, ce soit la Chine qui envahisse Taïwan lassée de demander permission aux Américains.

Un autre grand cynique de la raison d’état, Clausewitz pour ne pas le nommer, disait aussi de manière fort juste, que la guerre comme continuation de la politique par d’autres moyens.

Lorsque la diplomatie échoue, alors, les armes parlent. Qu’il s’agisse des lances de l’Antiquité, des arcs et des arbalètes du Moyen-Âge, ou des canons du 20ème siècle.

Se pose alors aujourd’hui une question. Le 21ème siècle sera-t-il celui de l’utilisation de l’arme nucléaire ?

Si cela reste encore peu probable à ce stade, le risque est chaque fois un peu plus élevé, car chaque tension supplémentaire nous rapproche du point du recours à l’arme ultime.

C’est dans ce contexte tendu que notre pays, déploie ses sous-marins nucléaires au maximum de nos capacités de dissuasion.

La France renforce son niveau d’alerte et déploie trois sous-marins nucléaires en mer

La France vient de rehausser son niveau d’alerte en matière de dissuasion nucléaire. Désormais, trois des sous-marins dotés de cette arme sont en mer, une situation inédite.

C’est sans doute le résultat ou tout simplement la réponse à la mise en alerte maximale des forces nucléaires russes, annoncée par le Kremlin quasiment au lendemain du déclenchement de sa guerre en Ukraine. La France notamment, seule puissance nucléaire européenne avec la Grande-Bretagne, vient aussi de relever son niveau d’alerte nucléaire : trois des quatre sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) dont dispose la Marine nationale sont désormais à la mer.

Bien sûr, nul n’apportera confirmation ou démenti à ce déploiement : la Marine nationale et les Forces armées en général ne communiquent jamais, aucunement, quant aux mouvements des forces spéciales comme des forces stratégiques, celles sur qui reposent la dissuasion française.

Avec ses 16 missiles balistiques d’une portée de 8 à 10 000 km nantis chacun de six ogives nucléaires de 100 kilotonnes, chaque sous-marin nucléaire lanceur d’engins français peut donc normalement remplir à lui seul la mission principale de dissuasion. La force de frappe française est en mesure de dissuader n’importe quel agresseur de s’en prendre au territoire national, à moins de vouloir subir une réponse dévastatrice.

La puissance de feu théorique combinée de ces trois SNLE, armés chacun de 16 missiles portant six ogives, représente l’équivalent de près de 2 000 fois la bombe d’Hiroshima.

Vous l’aurez compris.

Nos canons modernes représentent de quoi largement raser la Russie et ses principales villes.

C’est notre « ultima ratio regum », notre ultime argument. 

Quelle que soit l’analyse des responsabilités de la crise actuelle qui sont largement plus partagées et nuancées que ce que l’on voudrait bien nous faire croire, il n’en reste pas moins vrai, que nous n’évoluons pas dans un monde de paix.

Nous pensions être en paix parce que nous avons été suffisamment forts ces dernières décennies pour faire la guerre chez les autres. Nous avons délocalisé les guerres comme nous l’avons fait pour nos usines. La pollution de notre consommation est chez les autres, comme les morts de nos guerres sont chez les autres.

Nous évoluons donc dans un monde en paix pour nous mais en guerre pour les autres. Combien d’années de guerre au Moyen-Orient ? En Afrique ? Combien d’années de misère et de sanctions pour un pays comme l’Iran ?

Cette paix illusoire qui a été la nôtre a pris fin un 24 février 2022. Les Européens ont commencé à sentir le souffre et le souffle de la guerre.

Ceux qui pensaient que la dissuasion nucléaire ne servait à rien sont silencieux désormais et mieux vaut qu’ils se taisent.

Nos sous-marins, nos avions porteurs du missile nucléaire sont notre dernier argument. Notre « ultima ratio regum ».

Cela ne doit jamais servir.

Jusqu’au jour, où cela peut servir, et le fait même que cela existe peut permettre que l’on ne s’en serve pas. Ce n’est pas une mince différence.

Economiquement, ou à titre personnel vous pouvez décliner cette logique. 

L’or est « l’ultima ratio regum » pour assurer votre patrimoine financier.

Votre stock de ravioli est votre « ultima ratio regum » en cas de disette ou de famine, ou encore de restrictions.

Cela ne doit jamais servir.

Mais, l’histoire n’est pas faite de moyennes.

L’histoire est écrite par des évènements hautement improbables aux conséquences incalculables.

Tic-tac, Tic-tac…

Il est déjà trop tard, mais tout n’est pas perdu.

Préparez-vous !

Charles SANNAT

« Insolentiae » signifie « impertinence » en latin
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« À vouloir étouffer les révolutions pacifiques, on rend inévitables les révolutions violentes » (JFK)

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