Mes chères impertinentes, mes chers impertinents,

C’est la crise, c’est terrible, il n’y a plus de travail, c’est tellement dur, que vais-je devenir ? Ces questions là mes chers amis lecteurs, je les entends désormais presque tous les jours, dans les transports, chez mes proches, dans ma famille ou encore dans vos mails nombreux.

Aujourd’hui, parce que l’économie n’est pas une science dure, mais une « science sociale » je voulais vous parler de vous. Je voulais remettre l’individu, défini par sa capacité de choisir, au centre de la réflexion. De votre réflexion. Vous en ferez bien ce que vous voudrez ou ce que vous en pourrez. Il n’y a dans les considérations que vous pourrez lire qu’une infinie bienveillance à l’égard de toutes et tous, la vie étant pour beaucoup faites de vicissitudes et de difficultés surmontées avec plus ou moins de succès.

Ne vous demandez pas ce que l’Etat peut faire pour vous, mais ce que vous pouvez faire pour vous aider vous-mêmes !!

La phrase que vous venez de lire est un plagiat d’une citation un peu déformée et adaptée d’un Président américain. N’imaginez pas que dans ma bouche ce soit une ode au libéralisme le plus débridé ! Telle n’est pas ma vision des choses, mais au bout, du bout, tout au bout du compte, se trouve votre vie résumée par une succession de choix ou de non-choix plus ou moins heureux ou malheureux.

Notre vie est la conséquence de ces choix

Pour bien vivre, l’idée générale doit tourner autour de notre capacité à faire le moins de mauvais choix possibles, car évidemment nous en faisons tous des erreurs. Parfois, quand l’accumulation de mauvais choix est trop importante, la situation devient critique. Trop de nos concitoyens terminent dramatiquement sur les autoroutes sans radar du suicide avec plus de 11 000 morts par an et plus de 200 000 blessés. La société blesse. La société exerce une violence sur les âmes. La société peut retirer beaucoup de sens… MAIS, nous restons dans notre esprit fondamentalement libre de penser si nous faisons l’effort de penser et de poser des actes de choix issus d’un processus de réflexion.

La souffrance au travail n’est pas une fatalité

Il y a ceux qui ont compris parce qu’ils ont pu poser les mots sur leur situation, et toutes celles et ceux par millions qui souffrent tous les jours en silence, allant travailler la peur au ventre parce qu’il n’y a pas le choix, parce qu’il y a 6 millions de chômeurs, parce qu’il faut bien payer les crédits et accessoirement élever ses enfants.

Vous devez bien comprendre que c’est normal de raisonner de cette façon-là car c’est exactement de cette façon-là que l’on veut que vous raisonniez.

Les techniques de management sont en réalité des techniques de manipulations psychologiques

Vous n’avez pas idée de la puissance des idées et des mots. Ils détruisent, ils font mal, ou au contraire, ils élèvent, ils grandissent, ils mobilisent.

Le problème c’est que depuis une vingtaine d’année les mots sont utilisés à des fins malsaines dans le but soit de « fabriquer le consentement » des masses, comme l’a si bien écrit et expliqué l’activiste américain de gauche et brillantissime linguiste Noam Chomsky ce qui n’est qu’une forme d’endoctrinement moderne, soit comme techniques dites de management; ces techniques, et nous allons y revenir, ayant pour objectif de vous asservir au totalitarisme marchand.

Les techniques de management c’est quoi ?

Ce sont des outils basés sur l’étude de votre fonctionnement psychologique… enfin pas du vôtre, celui de façon générale de l’être humain.

Tous les managers vont être formés selon un principe pyramidal à ces techniques. Les petits encadrants n’auront droit qu’à la formation de base sans même comprendre la portée réelle de la puissance de ces premiers outils ni de leur dangerosité et qui seront dans des mains totalement incompétentes.
Plus vous monterez dans la hiérarchie, plus les outils auxquels vous aurez accès seront puissants et redoutables. L’idée c’est que le N+2 puisse avoir les moyens de pressurer le N-1, qui lui même dispose des outils pour pressurer les masses laborieuses d’en bas.

Prenons un exemple. Le petit commentaire glissé le vendredi soir à 17 heures juste avant votre week-end. « Pierre-Paul-Jacques, vous passerez me voir lundi à 10 heures dans mon bureau, il faut que je vous vois ». Rien d’autre évidemment, pas d’explication.

Vous allez me dire, celle-là je la connais (je sais c’est fait pour cet exemple, on a tous les mêmes chefs à la con qui ont suivi les mêmes formations venues des Etats-Unis et conçues par les mêmes grands cabinets de conseils), c’est pour me faire passer un sale week-end et me mettre la pression… erreur !

C’est pour déclencher en vous un processus de culpabilité qui va conduire à votre mise en infériorité psychologique. Vous devez vous sentir inférieurs au chef. Un être qui se sent inférieur est docile.

Comprenez-moi bien. Vous n’êtes pas inférieurs. MAIS vous devez vous sentir inférieur.

Nous pourrions multiplier les exemples à l’infini.

Une autre phrase type dans cette logique c’est quand un collaborateur répond à une question en disant à son chef « je crois que… blablabla ». Le chef martial lève la tête et dit d’un air glacial et sans appel « vous croyez, ou vous êtes sûr »… le message implicite est clair, « vous êtes une grosse merde en état d’infériorité et moi y en a être le grand chef omniscient ».

Vous pouvez tenter comme moi de jouer le malin en lui expliquant que par définition, si vous dites « je crois » il faute comprendre « je crois », ce qui implique une potentialité d’incertitude et de marge d’erreur dont l’analyse brillante de sa sainteté le chef devrait lui permettre de prendre quand même une décision basée sur des éléments partiels ce qui est le boulot d’un chef… Bon je vous le dis tout net, cette approche permet de vous faire plaisir, de sauvegarder en totalité votre estime de soi, mais rarement de favoriser une forme d’ascension dans votre carrière…

Je rappelle au passage que si vous dites « je crois » c’est que l’on vous formate depuis l’école à ne pas être sûr de vous !!! Si vous dites « je » dans une rédaction on vous explique que ce n’est pas bien, que c’est très prétentieux, et qu’il faut faire preuve de modestie (quand j’ai répondu que « JE pense, donc J’écris, donc JE suis » ce qui était parfaitement juste dans le contexte concernant mon utilisation abusive du pronom « JE » dans ma dissertation, je suis parti viré pour insolence)… Pourquoi ? Parce que seul(e) la maîtresse, le maître (le mot en lui-même n’est pas un hasard) ou le professeur est un « sachant qui sait »… vous, vous ne savez rien, vous vous taisez, vous obéissez !!

Là encore l’Education nationale a un gros travail à fournir avant de réussir à renforcer l’estime de soi des élèves, ce qui est évidemment la base pour lutter contre l’échec scolaire. Mais c’est un raisonnement sans doute trop complexe pour une telle institution, à moins que l’éducation ne serve pas à éduquer mais à formater de bons consommateurs bien obéissants.

Néanmoins cette approche est indispensable car nous n’avons pas encore parlé de l’essentiel. L’essentiel c’est la conséquence de votre mise consciente en infériorité.

La conséquence, la perte d’estime de soi, et c’est dramatique.

Soyons direct.

Quand on vous dit que vous êtes nuls en permanence c’est difficile d’avoir confiance en soi.

L’obéissance et la soumission que le totalitarisme marchand veut générer chez vous a pour conséquence la destruction de votre « estime de soi ».

L’estime de soi, c’est une idée essentielle de la construction psychique de chaque individu, de chaque être humain.

Basiquement, cette estime de soi est construite, si tout se passe bien, par vos parents pour qui vous êtes le plus beau, le plus grand, le plus merveilleux, le plus précieux des trésors.

Vous êtes un être exceptionnel dans le regard rempli d’amour de vos parents. C’est de cet amour que vous pourrez tirer la force, bien plus tard, d’affronter le monde des grands (pas toujours joyeux) !

Ceux qui n’ont pas cet amour infini et inconditionnel, cette admiration permanente et le regard attentif de leurs parents, ceux-là seront des blessés à vie et pour beaucoup hélas nous les retrouverons dans les statistiques d’une insondable tristesse que je citais plus haut.

Ce que je veux vous dire, vous faire comprendre, et faire comprendre à ceux autour de vous dont vous pouvez percevoir la détresse, c’est que l’on ne peut pas survivre longtemps à la destruction de l’estime de soi.

Or les techniques managériales détruisent l’estime de soi , ce qui est justement leur cible, pour vous rendre dociles et corvéables à merci.

Vous serez de plus en plus nombreux à devoir choisir entre vous et votre travail !

Lorsque l’on est lucide, si je pose la question « vous préférez vivre ou vous suicider en raison d’une dépression causée par la perte d’estime de vous au travail ? ».

Normalement vous allez le dire je préfère vivre… sinon c’est que vous en êtes à un stade trop avancé et dans ce cas là cela doit faire sonner un signal d’alarme. Dans ce cas vous ne seriez plus lucides.

Le problème c’est qu’hélas, la question est rarement posée en ces termes. Au contraire, votre entourage, bien intentionné et bien formaté aussi, va vous sortir l’ineptie suivante : «  Quooooooaââââ ??? démissionner ? Mais tu n’y penses pas, toi qui as un très bon travail, un beau salaire ? »… si vous laissez faire 10 secondes de plus vous aurez droit au sempiternel « mais qu’est-ce que tu vas faire ? ».

Le postulat de base erroné est que vous devez tout faire pour garder votre travail. A tout prix. Que votre travail lui ne vous garde pas à tout prix et que vous soyez « virables » à n’importe quel moment ne doit surtout pas rentrer dans la réflexion, pas plus que le fait que si vous continuez dans ce boulot, vous finirez au cimentière avec l’épitaphe suivante : »

Ci-gît Pierre-Paul-Jacques mort parce qu’il avait peur de quitter son boulot »…

« Sannat vous vous mettez en danger »…

Pour détendre un peu l’atmosphère, à l’époque où j’étais banquier il y a fort longtemps, j’avais eu l’outrecuidance au bout tout de même du 4ème hold-up à mains armées dans mon agence, d’écrire au Directeur du Groupe (un truc qui ne se fait pas, vu que cela ne suit pas la sacro-sainte voie hiérarchique) pour lui expliquer qu’au bout de 4 braquages en un an, ça serait bien d’installer un sas de sécurité et pas juste un panneau portes-ouvertes… bon évidemment, j’ai été convoqué pour une séance de soufflante devant le n+1, +2 et +3 réunis pour une séance d’exécution publique. Et le N+3 a eu cette admirable remarque en citant mes propos mon courrier sous les yeux « Sannat, vous ne vous rendez pas compte, avec ce genre de lettre, vous vous mettez en danger »…

Vous imaginez ma réaction évidemment… j’ai à mon tour soulevé les sourcils, utilisé l’arme fatale du silence (le silence est une arme terrible, un jour je vous expliquerai) et d’un ton glacial je lui ai répondu que « effectivement Monsieur, vous avez parfaitement raison. Chaque jour où je viens travailler, chaque heure passée ici me met dans un très grand danger. Vous avez parfaitement raison de si bien le dire après 4 braquages et toujours pas de sas ».

Bon l’agence a un eu un sas de sécurité et moi une mutation directe à l’agence ANPE (à cette époque on comptait en francs et on pointait à l’ANPE)… mais j’étais encore en vie.

Tout n’est pas possible, tout n’est pas acceptable et votre vie, souvent, vaut bien plus que votre emploi, même quand il y a 6 millions de chômeurs…

Tirez partie de la crise, changez votre vie, et changer votre vie c’est changer votre façon de voir!

Tirer profit de la crise n’est pas qu’une question d’argent. C’est bien l’argent, c’est super, c’est indispensable même, mais le bonheur ne s’achète pas, même si l’argent nous évite les malheurs matériels l’argent ne protège pas des maladies, de la tristesse ou encore et c’était l’objet de mes réflexions de la destruction massive de l’estime de soi des gens.

Alors, oui, il faut le dire, tirer partie de la crise c’est aussi savoir dire non, c’est aussi savoir demander ou négocier une rupture conventionnelle, c’est aussi savoir se réorganiser pour vivre autrement, pour gagner moins et vivre mieux ou vivre plus.

La crise fait que beaucoup parmi vous perdront leur travail, ou auront peur de le perdre.

Comment vivre sa vie dans la peur permanente ? Comment vivre quand votre chef lamine votre âme avec comme enjeu un pauvre tableur excel dont la case numéro 57892 n’a pas été incrémenté du bon chiffre… Tout cela est dérisoire, dérisoire et pourtant c’est tout votre environnement, toute votre vie, impossible de vous projeter sans votre tableur excel et votre chef caractériel parce que toute la société vous conditionne à supporter cela.

Certains font le choix de tout quitter, de changer de vie. Pour certains ça marche. Pour beaucoup… ça foire !

Je ne veux pas vous dire de quitter votre job ! Loin de moi cette idée-là et chacun doit vivre sa vie. Ce que je vous invite juste à faire en revanche, c’est à réfléchir aux conditions de votre servitude.

Qu’est-ce qui vous rend dépendant au point de supporter les pires humiliations ? L’égo ? L’ambition ? L’argent ? Les crédits à rembourser ? La peur ? Le carriérisme ? Peu importe vos réponses. Elles ne concernent que vous.

Ce qu’il faut en revanche c’est que vous pensiez dès maintenant à ce que vous ferez si votre travail vous quitte ou si le burn out vous brûle les ailes.

Comment créer les conditions de votre émancipation ? Il existe quelques réponses comme le désendettement, la simplicité volontaire et la baisse consciente de vos besoins, la constitution d’une épargne ou même, l’investissement dans votre futur outil de travail ou dans des savoirs-faire, sans oublier le déménagement pour aller dans des endroits moins chers.

Se préparez à ne pas subir la crise c’est chercher à ne pas attendre, à ne pas être passif, à ne pas subir en vain et sans visibilité.

Oui le travail tue, et il tuera de plus en plus.

Ne soyez pas une victime et pour ne pas être une victime il faut être indépendant car la main qui reçoit est toujours placée en dessous de celle qui donne. N’oubliez pas comme le disait Saint-Exupéry que l’on ne voit bien qu’avec le cœur, l’essentiel est invisible pour les yeux. Ne participez pas à la pression sociale qui consiste à critiquer malgré vous ceux qui n’en « peuvent » plus et qui veulent tout plaquer… entendez leurs souffrances et n’ayez pas peur, une autre vie est toujours possible!

En fait ce que je voulais vous dire c’était de prendre soin de vous.

Préparez-vous, il est déjà trop tard !

Charles SANNAT
Insolentiae signifie impertinence en latin
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« À vouloir étouffer les révolutions pacifiques, on rend inévitables les révolutions violentes » (JFK)

« Ceci est un article ‘presslib’, c’est-à-dire libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Insolentiae.com est le site sur lequel Charles Sannat s’exprime quotidiennement et livre un décryptage impertinent et sans concession de l’actualité économique. Merci de visiter mon site. Vous pouvez vous abonner gratuitement à la lettre d’information quotidienne sur www.insolentiae.com »

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