Depuis 2011, j’explique que la solution la plus élégante et la plus efficiente économiquement serait que nos amis allemands sortent les premiers de la zone euro.
Ceux qui veulent en savoir plus peuvent relire cet article “Messieurs les Allemands, sortez les premiers” ici.
Je ne retire toujours rien à cette analyse, car si demain les Allemands sortaient de la zone euro (ce qui n’est pas de leur intérêt tant l’euro leur permet de siphonner toute l’économie européenne), leur futur nouveau mark serait une monnaie de qualité, et l’euro certes très affaibli permettrait aux pays du Sud une dislocation de la zone euro tout en douceur et nettement plus progressive.
Ce qui est certain c’est qu’il faudra tout faire ou presque afin d’éviter une explosion de l’euro qui génèrerait très probablement un moment de chaos difficile à passer.
Charles SANNAT
Le récent référendum en Italie pourrait constituer un premier pas vers l’abandon de la monnaie unique dans ce pays.
Après le référendum en Italie qui a entraîné la démission du Premier ministre italien Matteo Renzi, le cours de l’euro a chuté à son plus bas depuis 18 mois.
Le départ du chef du gouvernement italien ouvre la voie aux eurosceptiques dont les voix se font de plus en plus entendre aux quatre coins du continent. L’avenir de la monnaie européenne commune suscite également de nombreuses questions.
Un référendum cinq étoiles
Les Italiens ont dit non aux propositions de changements de la structure étatique formulées par Matteo Renzi. Selon le premier ministre, ses initiatives — qui consistaient notamment à modifier le rôle du parlement pour le rendre plus pratique pour l’exécutif — auraient permis d’économiser jusqu’à 500 millions d’euros par an, ainsi que d’accélérer le processus d’adoption des lois.
Cependant, ce flirt avec les électeurs n’a rien donné : 60 % des votants se sont prononcés contre la politique de Renzi, qui a annoncé sa démission.
Le départ de Renzi ouvre la voie aux partis d’opposition qui prônent la sortie de l’UE, dont le Mouvement 5 étoiles et la Ligue du Nord.
Ces forces politiques profitent de la grogne croissante des électeurs face à la stagnation économique et à la vague de dizaines de milliers de migrants en provenance d’Afrique.
Un référendum pour la sortie de l’UE pourrait parfaitement être la prochaine étape.
Pour l’instant, c’est les Allemands qui paient
« Il ne faut pas seulement analyser les résultats du référendum italien en tant que tels mais également dans le contexte des événements qui l’ont précédé », estime Sergueï Khestanov, conseiller à la macroéconomie du directeur général de la société de courtage Otkrytie.
Il souligne que dans la plupart des pays développés, on n’a pas constaté de réelle amélioration du niveau de vie depuis 15 ans : « Cela concerne aussi bien l’Europe occidentale que les USA.
La colère qui monte s’exprime dans le soutien, par les électeurs, de décisions opposées à l’establishment en place. C’est arrivé au Royaume-Uni où la population a voté pour le Brexit.
C’est également arrivé aux États-Unis où la course présidentielle a été remportée par le candidat “hors système” Donald Trump ».
« La principale tendance est que les citoyens de différents pays expriment leur mécontentement.
Nous assisterons très probablement au remplacement du parti au pouvoir en France, l’avenir de la CDU en Allemagne, parti de la chancelière Angela Merkel, est remis en question.
Tout cela montre que des tendances centrifuges viennent remplacer les tendances centripètes », estime l’expert. Le résultat du référendum italien est une nouvelle bataille remportée par les forces centrifuges mais la fracture n’est pas encore actée.
L’octroi d’une nouvelle tranche d’aide économique à l’Italie suffirait à compliquer les manœuvres des eurosceptiques. Pour la zone euro, les élections en Allemagne seront décisives car ce pays est le dernier bastion de l’eurocentrisme.
Si l’alliance CDU-CSU perdait, la balance pourrait pencher de l’autre côté. « L’Allemagne joue le rôle de sac à billets de l’UE.
En cas d’apparition de problèmes dans les pays de l’UE, Berlin les atténue avec son aide financière. Ce fut le cas, par exemple, pendant la crise de la dette dans le sud de l’Europe autour de la Grèce », analyse Sergueï Khestanov.
Si le processus centrifuge était fluide et contrôlable, il serait possible d’éviter de nombreux troubles aussi bien pour certaines économies que pour le marché monétaire.
L’UE est parfaitement capable d’initier et de gérer la sortie de pays à l’économie relativement faible (les fameux PIGS — Portugal, Italie, Grèce, Espagne) et mal intégrés à l’Europe unie en raison de différences considérables de niveau de développement.
Cependant, pour l’instant, les élites européennes ne sont pas prêtes à mener cette « désintégration fluide », ce qui rend plus plausible le scénario lié à l’arrivée au pouvoir des eurosceptiques en France et en Allemagne. Ils saboteraient l’octroi d’une aide aux pays du sud de l’Europe et stimuleraient ainsi les processus centrifuges sur le continent.
La monnaie contre l’UE
« À en juger par la dynamique actuelle, le marché monétaire soutient l’euroscepticisme. De cette manière le marché évalue les perspectives de la zone euro, voire de l’intégration européenne dans l’ensemble », note Sergueï Khestanov. D’après l’expert, il est possible que l’an prochain un euro vaille un dollar, un niveau historique.
Si en août 2016 le cours rouble-euro atteignait 75 roubles, il a baissé jusqu’à 68 roubles aujourd’hui. Quant au cours dollar-euro, la monnaie européenne a atteint son record (1,15 dollar pour 1 euro) en avril 2016, avant une chute en octobre-novembre.
Le dollar s’avère être la monnaie la plus forte aujourd’hui et étant donné que cette monnaie et le pétrole sont en antiphase, le renforcement du dollar est une mauvaise nouvelle pour les marchés des matières premières.
Si, au final, les forces centrifuges prenaient le pouvoir en Europe et que d’ici là on comprenait définitivement que l’Opep, qui a décidé de réduire la production pétrolière, était incapable de se tenir à sa décision, l’effet négatif ne ferait que s’accentuer. Avec toutes les conséquences que cela implique pour les pays dépendants du pétrole.