Normalement, désormais, tous les lundis, vous devriez retrouver un billet de notre camarade Hubert, auteur d’un dossier important et très technique sur l’assurance vie.

J’ouvre ces colonnes à Hubert et il a liberté totale pour dire ce qu’il pense, ce qui viendra enrichir la réflexion de tous.

Je vous souhaite une bonne lecture.

Charles SANNAT

Bravo à notre « intelligentsia médiatique » pour « organiser l’actualité » afin d’avoir à commenter sans fin des événements « très importants » qui ne « passionnent » que cette partie de notre société, alors que ne se profile rien de moins qu’une élection présidentielle et que l’on aimerait bien avoir une information « claire et non tronquée » concernant le détail des programmes, la vision de la crise… de chacun des candidats déclarés et plus globalement des informations auxquelles on pourrait davantage porter crédit.

Mais non, une grande partie de nos « journalistes » se complaisent dans un « grand Barnum ». C’est quoi exactement ? Du tartuffe ? La commedia dell’arte ? Une partie de bonneteau ? Il y en a marre… de la surmédiatisation : des « z’affaires », de l’hyperdiabolisation du FN, des « bons mots » de telle personnalité politique, de l’exégèse de la déclaration « non consensuelle » de tel ou tel candidat… Les chiens écrasés quoi !!

Allons mesdames, messieurs les journalistes, remettez l’information dans le bon ordre. L’enjeu est suffisamment important pour traiter du fond, des idées, des programmes et surtout, de la situation de l’endettement de la France… à la une, et de garder le reste pour vos rubriques secondaires.

L’état de notre dette

Le rapport Pébereau de 2005 que je citais dans mon billet du 13 avril 2012 n’a, comme à l’habitude, pas été suivi d’effets. Ce mois-ci, un nouveau rapport de l’institut de l’entreprise, toujours présidé par Michel Pébereau, est sans ambiguïté dès son titre : « Dépenses publiques : l’état d’alerte ». La première partie de ce document de 90 pages donne le ton, « nos finances publiques sont dans une situation alarmante du fait de la dérive de la dépense ».

Pour « vous éviter » de lire les 90 pages du rapport, j’ai relevé quelques points que je juge significatifs. Points dont nos « journalistes » auraient été bien inspirés de demander l’avis et leur « solution » aux différents candidats à la présidence afin de mieux alimenter notre réflexion et, donc, de voter en connaissance de cause.

  • « Le régime général de la Sécurité sociale est installé dans le déficit, ce qui nous distingue de tous nos grands voisins. Or certains responsables politiques estiment que les comptes publics sont désormais assainis. »

Serait-ce en écho à la déclaration conjointe de notre ministre des Affaires sociales Marisol Touraine, accompagnée du secrétaire d’État au budget Christian Eckert, lors de la présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017, le  27 septembre dernier, selon lesquels « le déficit du régime général sera ramené en 2017 à un niveau proche de l’équilibre pour la première fois depuis 2001 » ?

  • « La France fait aujourd’hui partie des trois pays, avec la Grèce et le Portugal, qui relèvent encore de la procédure européenne de déficits excessifs. Compte tenu des résultats de 2016, seules la France et la Grèce devraient être encore concernées en 2017. »
  • « L’écart entre le passif et l’actif est négatif depuis le bilan d’ouverture du compte général de l’État en 2006. Sous l’effet des déficits successifs imputés sur le compte de résultat de l’État, cette situation nette s’est constamment et très significativement détériorée au cours des dix derniers exercices comptables, passant de – 593 Md€ en 2006 à -1 115 Md€ en 2015. »
  • « Cette valeur des actifs de l’État ne tient en outre pas compte des engagements hors bilan au titre des retraites des fonctionnaires, des salariés de la Poste et des ouvriers de l’État (plus de 1 700 Md€ en 2015), ni des engagements au titre de l’équilibre des régimes spéciaux (270 Md€). »

Près de 2 000 milliards d’euros « oubliés ». Excusez du peu !! La majorité des commentaires sur la dette, faits par nos « z’économistes médiatiques » se fondent sur des mesures et des calculs « officiels ». Autant dire que ceux-ci sont très loin de la réalité comme je l’ai déjà expliqué dans mon billet du 11 novembre 2014. Tout cela ne concerne que la dette au sens de Maastricht, et non l’ensemble des engagements de l’État, les fameux « hors bilans » cités dans le rapport, auxquels s’ajoute la « garantie de bonne fin » donnée par l’État à des engagements financiers pris par des sociétés publiques, des collectivités locales… « L’astuce » de l’INSEE dans ses publications consiste à évaluer une dette nette, en en retirant les titres détenus par l’État actionnaire (qui représentent quand même… 203 milliards d’euros).

Le rapport énumère parfaitement les enjeux et donc « les vraies « questions à poser à tous les prétendants à la magistrature suprême par nos brillants journâââââlistes :

  • « Nos partenaires européens, les institutions chargées d’évaluer nos finances publiques et les investisseurs dont la confiance est indispensable pour assurer le financement de notre dette seront très attentifs aux premières mesures du futur gouvernement issu des élections présidentielles et législatives de 2017. Ils le sont déjà s’agissant des débats en cours. »
  • « Or 2017 représente une année déterminante pour notre pays. La France ayant presque systématiquement manqué à ses engagements budgétaires au cours des dernières années, les observateurs ne se contenteront plus de seules déclarations d’intentions. Ils exigeront des engagements normatifs et contraignants suivis de résultats. »

Ce rapport Pébereau de 2017 est largement conforté par la Cour des comptes, qui ne dit pas autre chose dans son rapport annuel du 8 février 2017. M’attachant à vous éviter une conjonctivite aiguë résultant de la lecture de ces 1 000 pages (!!), voici quelques morceaux « arbitrairement choisis »… bien conscient que je n’échappe pas à la partialité que je reproche si vite à nos journalistes :

  • « La réduction de 0,2 point du déficit en 2016 prévue par le Gouvernement provient pour une large part de la baisse de la charge d’intérêts et celle-ci résulte uniquement de la baisse des taux, la dette publique elle-même ne se réduisant pas. Le solde primaire, c’est-à-dire hors charge d’intérêts, ne diminuerait ainsi que très faiblement. Sur la période 2012-2016, plus de 40 % de la réduction du déficit public est attribuable à la baisse de la charge d’intérêts. »
  • « Un objectif de déficit pour 2017 très difficile à atteindre. En 2017, la loi de finances retient une réduction du déficit public de 0,6 point de PIB, qui le ramènerait à 2,7 points de PIB. Cette réduction, nettement plus ambitieuse que celle visée pour 2016, repose sur une amélioration sensible des comptes de l’État et des administrations de sécurité sociale, partiellement compensée par le retour à un léger déficit des administrations publiques locales. »
  • « La prévision de recettes est assise sur des hypothèses de croissance économique et d’élasticité des recettes à cette croissance économique qui paraissent un peu élevées, même si elles restent atteignables, tandis que la prévision sur le coût des contentieux fiscaux laisse une marge de «bonnes surprises» plus faible que les années précédentes. »
  • « Des mesures nouvelles conduisant à accélérer sur 2017 les encaissements et à reporter sur 2018 l’impact de nombreuses baisses de prélèvements. »

Quel journaliste « osera » poser cette simple question à un dirigeant politique ou, mieux, à un prétendant à la présidence… C’est le bon moment, non ?

« Monsieur le candidat, cette dernière remarque de la Cour des comptes s’apparente à une opération «de cavalerie» et est, à juste titre, lourdement condamnée par les tribunaux lorsqu’elle est pratiquée par un chef d’entreprise. Pourquoi le gouvernement a recours à ce type d’opération impunément ? ».

Notre décérébration est-elle en marche ?

France Stratégie, vous connaissez ?… Créé par le décret n° 2013-333 du 22 avril 2013, ce « machin » se définit ainsi : « laboratoire d’idées public, c’est un organisme de réflexion, d’expertise et de concertation. » Ce n’est pas tout. Cette noble institution « se veut à la fois un outil de concertation au service du débat social et citoyen, et un outil de pilotage stratégique au service de l’exécutif ». Je suis toujours « admiratif » devant l’appellation de toutes ces structures qui nous coûtent si cher et dont le « travail » est si peu évalué !!

Le 14 décembre dernier, France Stratégie publiait une analyse intitulée « Quelle fiscalité pour le logement ? Actions critiques ». Ce titre, peu « racoleur », a pourtant fait l’objet de vives réactions.

Effectivement, bien que ne datant pas d’aujourd’hui, j’ai évoqué cette « bonne idée » à plusieurs reprises, le sujet est « sensible ». En effet, il s’agit d’assujettir la valeur locative du logement occupé par son propriétaire à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux !! Aux dernières nouvelles, le gouvernement « n’envisage pas » cette taxation comme je vous en ai informés dans la rubrique « À garder en mémoire » du 14 de ce mois. Ce n’est pas pour autant qu’il faut être rassuré et donc… c’est « à garder en mémoire » !!

Mais revenons à France Stratégie. Cette docte assemblée s’est récemment posée une question d’importance : « Quels sont les impacts des écrans sur les cerveaux ? » Avec le concours de l’école des hautes études en sciences sociales (EHESS) et l’institut national de recherche dédié au numérique (INRIA), elle a organisé un séminaire public le 2 février dernier avec deux spécialistes de ce sujet. Il s’agit de Daphné Bavelier, professeure de sciences cognitives à l’université de Genève, et Sophie Pene, professeure à l’université Paris Descartes et vice-présidente du Conseil national du numérique.

Quand on  sait que la télévision est regardée en moyenne plus de quatre heures par jour, selon la société Médiamétrie, et le temps passé devant « nos écrans », qu’ils soient d’ordinateur, de tablette ou de smartphone (l’information, ou dénommée telle, est accessible en tout lieu et par tout moyen) est significatif, il est intéressant d’en connaître les potentiels effets.

Plusieurs points émergent de cette table ronde :

  • Dans le champ des neurosciences comme dans celui des sciences sociales, le constat est sans appel, « l’interface relationnelle et informationnelle » de l’écran modifie les perceptions des personnes. Cela étant, il y aurait autant d’impacts qu’il y a de technologies, d’usages, voire de personnes ;
  • Une pratique régulière du jeu améliore globalement « l’attention visuelle sélective ». Les joueurs de jeux d’action évaluent plus précisément un plus grand nombre d’objets que les non-joueurs… (Surtout, ne faites pas lire cette partie de mon billet à vos enfants !!) ;
  • L’usage du smartphone nous a fait perdre en « mémoire déclarative » (celle des numéros de téléphone et des départements) mais gagner en « mémoire transactive » (celle du « lieu » où trouver l’information);
  • Mails, textos, notifications en tout genre… les écrans parasitent, voire obligent à une forme de disponibilité permanente qui se traduit pour le salarié par « une accélération, une fragmentation et une intensification de son travail ».

À ce point de mon billet, je retiens la conclusion de Sophie Pene : « Les écrans modifient également notre rapport à l’information. Ils tendent à nous «égarer» »…

Je vous prie de bien vouloir excuser le fait que… je vous quitte (via mon écran de PC) pour aller… regarder les « z’infos » à la télé !!

Mes chers lecteurs, je vous aime et vous salue.

Hubert Boeltz

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