Je n’avais pas eu le temps de partager ce billet de notre ami Charles GAVE. Ici, un peu de “spiritualité”, toujours bienvenue dans notre monde de mécréants.

D’ailleurs, à propos de mécréance et de réduction des hommes à leur dimension unique de “con-sommateur”, il est fondamental de ne jamais oublier que notre société purement mercantile heurte considérablement par son incapacité à la transcendance et au mystique.

Ce besoin de croire, cette nécessité de Dieu, n’est pas une question de couleur, de lieu ou d’époque. De tous temps et sur tous les continents, nous avons “cru”. Que cela plaise ou non, empêcher de croire ou imposer de ne pas croire, c’est rejeter l’une des composantes essentielles de notre humanité.

Charles SANNAT

Avis aux lecteurs,

Je refais une petite crise d’émerveillement quand je considère notre civilisation judéo-chrétienne. En fait, je ne peux pas m’empêcher d’être béat d’admiration compte tenu de ce qui a été accompli en vingt siècles. Je déconseille donc fortement la lecture de ce papier à ceux parmi les lecteurs qui penseraient que la France a commencé à briller en 1793 et que les solutions économiques choisies par le Venezuela représentent un espoir pour notre pays.

Je tiens à rassurer le lecteur : ces crises d’admiration que j’éprouve de temps en temps pour la religion chrétienne sont un peu comme le paludisme, récurrentes mais peu dangereuses, et celle-ci va sans aucun doute s’arrêter très prochainement et je vais retrouver mon état normal.

Je me demande cependant si elles n’ont pas tendance à devenir plus fréquentes, ce qui pourrait perturber certains lecteurs attachés aux valeurs du laïcisme. Leur restera toujours l’option d’aller sur le site de Mediapart ou du Monde Diplomatique.

Cette remarque qu’Hamlet fait à Horatio dans la pièce de Shakespeare m’a toujours fasciné. Le divin barde nous fait comprendre qu’il y a des choses qui sont vraies, mais que l’on ne peut ni prouver, ni expliquer.

Je m’approche de mes 75 ans et je voudrais vous faire part d’un certain nombre d’expériences qui prouvent à quel point Shakespeare avait raison

Commençons par celle que je viens de connaître à Rome, d’où je vous écris ces lignes.

Mon épouse et moi-même avions été invités à visiter le tombeau du saint que des fouilles archéologiques ont découvert au Vatican, sous Saint-Pierre de Rome.

Voici l’histoire.

Le prédécesseur de Pie XII, Pie XI avait voulu être enterré dans la crypte, sous Saint-Pierre de Rome.

En construisant le tombeau, les ouvriers creusèrent le sol et d’un seul coup trouvèrent le vide en dessous d’eux.

L’on prévient Pie XII.

La tradition disait depuis toujours que le tombeau du premier Pape était quelque part en dessous.

Pie XII, à qui l’on conseillait de ne pas faire de fouilles, répondit que l’Église n’avait pas peur de la vérité et ordonna que des fouilles archéologiques aient lieu.

Elles se termineront sous Paul VI.

Et l’on découvrit le tombeau de Pierre en dessous de la Basilique qui avait été construite par Constantin au IV siècle, réaménagée par Grégoire le Grand quelques siècles après, avant que cette église ne soit rasée pour laisser place à la structure actuelle à la Renaissance

Et chose extraordinaire, le premier autel était bien sûr à la verticale parfaite du tombeau de Pierre et de l’endroit où avait reposé sa tête, mais le deuxième autel aussi (celui de Constantin), ainsi que le troisième, celui de Grégoire le Grand et enfin le grand autel actuel, alors qu’à la Renaissance, tout le monde avait oublié où était le tombeau de Pierre [CG1] …

Qui plus est, les ossements qui y furent trouvés, dissimulés dans le mur de soutènement du tombeau primitif, étaient ceux d’un sémite de 70 ans, assez corpulent et à qui manquaient les pieds. Or les crucifiés étaient souvent détachés de la croix où ils avaient été cloués en leur coupant les pieds, pour gagner du temps…

À mon humble avis, la probabilité que les quatre maîtres autels historiques aient été parfaitement à la verticale de Pierre alors que pour la construction du dernier on avait totalement oublié où était le tombeau original doit être assez proche de zéro.

Et donc quand Jésus dit à Pierre « Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église », on peut le comprendre au sens mystique, mais on peut aussi le comprendre au sens purement réel.

Dans la réalité, l’Église que les disciples de Pierre ont bâtie pour leur maître a été bâtie littéralement SUR Pierre…

Il y a plus de choses dans le ciel et sur la Terre, mon cher Horatio…

Un deuxième exemple : l’armée américaine s’est rendu compte qu’un certain nombre d’officiers ou de sous-officiers avaient une caractéristique surprenante. Ils faisaient mettre tous leurs hommes à l’abri alors que rien n’indiquait le moindre danger, juste avant que l’enfer ne se déchaîne, sans qu’ils puissent expliquer pourquoi ils avaient pris cette décision.

La meilleure explication qu’ils donnaient était que l’air était devenu immobile, ce qui n’est guère scientifique.

Il y a plus de choses sur la Terre et dans le ciel…

Venons-en à une expérience personnelle, tout aussi étonnante.

J’ai une maison que j’aime beaucoup en Avignon et le curé de mon village est un homme fort jeune et tout à fait éminent, que j’apprécie beaucoup.

Il y a environ dix ans, cet ecclésiastique vient me voir et me dit que les cloches de son église (Gothique, du XIVe siècle) étaient foutues et qu’il allait falloir les changer, ce qui allait coûter fort cher et qu’il allait devoir demander de l’argent à ses paroissiens.

Je compris à demi-mot (j’ai une intelligence très fine), l’année avait été bonne, et je dis à mon cher curé que j’allais prendre en charge cette dépense, ce que je fis et j’oubliais toute cette affaire instantanément, en suivant en cela le principe des Évangiles, que ta main droite ne se souvienne pas de ce qu’a fait ta main gauche quand tu fais l’aumône.

Quatre ou cinq années passent et mon fils nous fit la grande joie de faire baptiser sa dernière fille dans notre maison d’Avignon.

Arriva le moment où le prêtre demanda au parrain : “Comment va s’appeler cette enfant ?”

Ce à quoi le parrain répondit : « Charlotte, Marie, Cécile ». Charlotte, à cause de moi, Marie-Cécile à cause de ma sœur, marraine de mon fils.

Le prêtre s’arrêta alors comme foudroyé et me dit : « Saviez-vous que ce sont les noms des trois cloches de l’église, depuis sa construction, c’est-à-dire depuis plus de sept siècles ?”

Je ne savais même pas que chaque cloche dans chaque église est « baptisée » et porte le nom d’une sainte…

La cérémonie fut interrompue pour que toute l’assemblée puisse aller admirer les cloches et les faire sonner dans le clocher, à la grande satisfaction de tous les petits garçons qui étaient là, et en redescendant le prêtre me dit en souriant : « Je crois que votre don a été accepté. »

Il y a plus de choses sur la Terre et dans le ciel…

Pourquoi je raconte tout cela ?

Parce que prendre une décision requiert de prendre en compte non seulement la réalité mesurable, mais aussi celle qui ne l’est pas.

Je m’explique.

Un certain nombre de grands philosophes, comme Thomas d’Aquin, ont réfléchi sur la notion de « prise de décision ».

Pour eux, pour agir, dans le monde, avec efficacité, il faut d’abord que cette décision soit prise librement, ce qui va sans dire et suppose une société de liberté.

Ensuite, il faut s’attacher à comprendre la réalité, pour ne pas prendre des décisions insensées.

Mais qu’est-ce que la réalité ?

C’est bien sur l’addition de ce que l’on tire de l’analyse de ce qui peut être mesuré auquel on doit ajouter le résultat de l’instinct, de l’expérience, de l’histoire…

Une partie objective, une partie subjective…

Mais de cette proposition évidemment VRAIE, notre monde est passé à une seconde qui est évidemment FAUSSE.

Car la technocratie imbécile qui nous gouverne sous le nom d’hommes de Davos depuis un grand moment essaie de nous faire croire que tout ce qui ne peut être ni mesuré ni compté ne fait pas partie de la réalité et cette idée, nous disent aussi bien Shakespeare que la logique fondamentale, est tout simplement fausse.

« L’absence de preuves ne vaut pas preuve de l’absence » nous dit la logique, ce qui est une façon compliquée de dire ce qu’Hamlet dit à Horatio.

La radioactivité existait avant que Marie Curie ne la découvre…

Ces redoutables obscurantistes non seulement veulent que nous croyions que seul ce qui est mesurable existe mais, et c’est beaucoup plus grave, que ce qui n’est pas mesurable n’existe pas.

Et donc, pour eux, l’amour filial, le patriotisme, le désir pour un homme qui vieillit de laisser un héritage à ses enfants, le désir de servir, la recherche du bien commun, l’attachement à la religion de ses ancêtres et que sais-je encore, tout cela n’existerait pas ?

Ils veulent nous faire passer de citoyen à consommateur abruti, et ils y sont presque arrivés, mais ils vont échouer.

Il faut que les poètes se réveillent et à la mise à l’écart, partout, de ces technocrates abominables pour qui la vie se résume en des statistiques du PIB.

Georges Brassens, au secours !

Les temps qui s’annoncent seront ceux du réveil du réel non mesurable contre le réel mesurable car comme le disait le Christ, l’homme ne vit pas que de pain.

Et le plus tôt sera le mieux, mais je suis certain que le mouvement a déjà bien commencé

Source IDL ici

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