Merci au Figaro d’être venu voir ce que je pensais des cours de l’or. Encore une fois, soyez serein, ne spéculez pas ou alors ne confondez pas votre ligne “spéculation” avec votre ligne “assurance” de votre patrimoine. Si à court terme certains facteurs sont négatifs pour l’or, à moyen et long terme, nous ne sortirons de cette crise que par la déflation et l’insolvabilité généralisée, ou par l’hyperinflation.
Charles SANNAT
L’or pourrait bénéficier d’un retour de l’inflation, estiment les analystes.
Le métal précieux voit son prix augmenter. Il profite des inquiétudes sur la croissance chinoise et des tensions géopolitiques au Moyen-Orient. Des craintes qui pourraient lui être favorables à long terme.
L’or suscite à nouveau l’intérêt des investisseurs. Malgré une séance de lundi en légère baisse à 1098 dollars l’once, le métal précieux affiche, dépuis le début de l’année, une hausse de son cours à contre-courant des baisses encaissées par les autres matières premières. L’once d’or a gagné 3,5% depuis le 1er janvier. Vendredi, il avait même atteint 1113,57 dollars, un niveau qui n’avait pas été observé depuis deux mois. La semaine dernière, l’or a enregistré sa plus forte hausse hebdomadaire depuis fin août alors que les cours du pétrole plongeaient à 33 dollars et que les grandes Bourses mondiales connaissaient des baisses sans précédent pour un début d’année avec des reculs hebdomadaires de 6,2% pour le Dow Jones à Wall Street, de 7% pour le Nikkei et de 7,2% pour l’EuroStoxx 50 de la zone euro.
L’or profite à plein des inquiétudes des marchés mondiaux et retrouve son statut de valeur refuge. En effet, les mauvaises nouvelles se multiplient. En provenance de Chine, tout d’abord. Plusieurs indicateurs ont confirmé le ralentissement de la deuxième économie mondiale. La banque centrale chinoise a en outre abaissé le cours de référence du yuan face au dollar pendant huit jours consécutifs, avant de le relever légèrement vendredi. Les chiffres du commerce extérieur, de la production industrielle, des ventes au détail de décembre et surtout le taux de la croissance de 2015 sont attendus dans les prochains jours et ils s’annoncent inquiétants. À cela s’ajoutent l’escalade des tensions entre l’Arabie saoudite et l’Iran et l’annonce, par la Corée du Nord, de son premier essai de bombe à hydrogène. «L’environnement d’aversion au risque sur les marchés a encouragé l’appétit pour les actifs refuges et a par conséquent envoyé l’or à un nouveau plus haut depuis début novembre», a commenté Lukman Otunuga, analyste chez FXTM.
«Si l’or vaut très cher, la monnaie ne vaut plus rien» Charles Sannat, économiste
À court terme, toutefois, rares sont les observateurs à croire à la poursuite de ce rebond. Selon eux, l’or pourrait souffrir de la concurrence du dollar en tant que valeur refuge. La monnaie américaine est revigorée par les bons chiffres du dernier rapport américain sur l’emploi qui confortent la décision prise le mois dernier par la Fed de relever ses taux d’intérêt pour la première fois en dix ans. Un billet vert fort pèse aussi sur les achats de métaux précieux, libellés dans cette devise et donc rendus plus onéreux pour les investisseurs munis d’autres devises. «À moins d’une guerre, entre l’Arabie Saoudite et l’Iran par exemple, je ne vois pas de facteurs qui pourraient soutenir la hausse à court terme», note Charles Sannat, économiste et éditorialiste du site Insolentiae.com.
À moyen et long terme, en revanche, le métal précieux pourrait bénéficier de solides facteurs haussiers, estime le spécialiste. «La dynamique économique globale est négative, comme le montrent les signaux envoyés depuis la Chine. Les opérateurs anticipent un maintien ou un retour à des politiques monétaires très accommandantes visant à lutter contre les pressions déflationnistes. Au final, ces politiques aboutiront à un retour de l’inflation. C’est ce qui sera bénéfique pour l’or qui est un outil de protection contre ce phénomène», explique-t-il. Difficile en revanche d’imaginer jusqu’où pourrait grimper l’or à cet horizon. «Dans une situation d’hyperflation mondiale, l’or pourrait grimper jusqu’à 10.000 dollars l’once! Mais faire des estimations n’a pas vraiment de sens dans ce type de scénario. Ce qu’il faut retenir, c’est que si l’or vaut très cher, la monnaie ne vaut plus rien. Comme dans l’Allemagne des années 1920, lorsqu’une once d’or valait environ 88.000 milliards de marks!», rappelle Charles Sannat.