Mes chères impertinentes, mes chers impertinents,
Je continue dans ma série les banques veulent votre bien… surtout les banquiers d’en-bas, souvent plus ou moins gentils mais dont l’objectif est uniquement de vous convaincre de servir de contrepartie et que vous régliez votre quote-part de frais bancaires, nécessaire à la bonne tenue des comptes de la banque et à sa capacité à servir des bénéfices et des dividendes plantureux à ses gentils propriétaires.
Il ne s’agit pas du tout de faire peur, ou d’inquiéter, mais d’aider les lecteurs, les « usagers » des banques comme l’on dit à comprendre les risques liés aux placements bancaires.
Ce qu’il y a de très interressant avec le cas de la faillite de 4 banques en Italie et la ruine de très nombreux épargnants, c’est que pour la première fois depuis assez longtemps, les banques ne sont pas sauvées par les Etats ! Les banques ne sont pas sauvées par l’argent du con-tribuable mais par celui du « con-somateur » !
Il s’agit d’une première application à petite échelle des nouvelles règles européennes sur la faillite ordonnée des banques.
Un retraité italien qui avait investi ses économies dans des titres toxiques vient de se suicider.
Comme nous l’apprend cet excellent article de Courrier International,
« Luigino d’Angelo, c’est ce retraité dont on vient d’apprendre le suicide, survenu deux semaines plus tôt. Sur les conseils de sa banque, il avait investi ses économies dans des obligations décrites comme sûres, mais qui se sont avérées toxiques. Désespéré, il a laissé une lettre dans laquelle il explique ses vains recours pour tenter de récupérer sa mise, et s’est pendu.
Qui est responsable ?
Le décès de Luigini D’Angelo a eu lieu quelques jours après l’application, le 22 novembre, du décret “Salva-banche” pour le ‘sauvetage’ de quatres banques, dont la sienne, la Banca popolare dell’Etruria. Une opération, explique le journal économique Il Sole-24 Ore, qui s’est faite sans recourir à l’argent du contribuable, mais en créant une ‘mauvaise’ banque, à laquelle ont été confiés les actifs toxiques et qui a été liquidée, et de ‘bonnes’ nouvelles banques, qui ont pu repartir sur de nouvelles bases. Contrairement aux “actionnaires et aux souscripteurs d’obligations subordonnées [dont le remboursement n’est pas prioritaire si l’établissement fait faillite], qui ont perdu leurs économies”, souligne le Corriere. En tout, 130 000 personnes sont concernées, précise le Huffington Post ».
Que faut-il comprendre et quels sont les risques ?
Si vous êtes actionnaire d’une banque, en cas de gros problème, l’action vaudra tout simplement 0 ou presque ! Vous serez ruiné. Pourquoi ? Parce que dans les nouvelles règles, l’idée sous-jacente qui sous-tend les textes, c’est que l’argent public ne soit plus utilisé !
Si vous êtes détenteur d’obligations émises par la banque, cela revient à dire que vous avez prêté à la banque. C’est votre épargne qui sert d’emprunt… et si l’emprunteur ne vous rembourse pas et bien vous serez ruiné. C’est ce qui vient d’arriver à ces 130 000 italiens plus ou moins spoliés.
En France un système de placement assez largement répandu est la souscription de « parts » de sa banque… certains s’y reconnaitront. Vous pouvez souscrire ces parts, mais vous augmentez votre profil de risque, pour passer votre épargne d’une situation où elle est déposée à la banque à une situation où vous avez investi dans cette banque. Cela n’est évidemment pas la même chose.
Chaque client voit sa rentabilité individuelle étudiée !
Sachez-le, comprenez-le, dans les logiciels informatiques (on n’arrête pas le progrès) chaque client possède une « rentabilité » calculée. Ainsi si vous coûtez de l’argent à la banque, vous n’obtiendrez rien, et on essaiera même de vous mettre plus ou moins gentiment dehors. Nombreux sont les clients à ne pas comprendre du tout pourquoi ils sont mal traités alors qu’ils ne sont jamais à découvert !!! Mais justement. Pas de carte bancaire, une utilisation importante des chéquiers, pas de frais de découvert, l’absence d’une épargne importante dans des placements qui rapportent aux banques comme l’assurance-vie et l’on veut vous mettre dehors. Ayez donc conscience de votre rentabilité… au moins vous comprendrez mieux pourquoi parfois vous n’arrivez à rien. Dans ce cas, la seule solution est de migrer vers une banque en ligne. Vous n’aurez rien, mais au moins vous ne paierez pas grand chose !!!
Les gens sont gentils et naïfs !
C’est comme avec les politiciens. Cela fait 50 ans que l’on nous fait des promesses qui sont systématiquement pas tenues. Pourtant nous avons besoin de croire et de nous mobiliser. Nous votons, pour le plus souvent être déçus et pourtant nous continuons ce petit jeu.
Avec les banques c’est la même chose et je trouve que c’est très bien expliqué d’ailleurs dans cette article.
“Dans l’imaginaire collectif, les banques conservent une dimension humaine, écrit l’éditorialiste de La Stampa. Loin de la classe dirigeante, “le monde réel est fait de gens simples qui ressemblent à M. Luigino. Des gens qui entrent à la banque comme à l’hôpital : avec l’espoir et la nécessité d’être en confiance”.
Oui, on a envie de faire confiance à sa banque (sinon comment lui confier son argent et ses petits secrets en toute sérénité, on va donc s’autoconvaincre que sa banque est “bonne”), on veut croire qu’elle nous veut du bien et même plus, on a envie de croire son banquier, un « être humain » assis, là en face de nous.
Dans son éditorial, le Corriere della Sera s’en prend, comme La Stampa, à la responsabilité des banques : il épingle, dans la lettre de Luigini, une citation attribuée à un fonctionnaire de sa banque, auquel il s’était adressé après avoir appris que la cote de risque de son placement avait encore empiré : “D’après vous, si je pensais que c’était une arnaque, je vous dirais de laisser tout cet argent là-dedans ?”
Sauf que l’être humain, assis, là en face de vous, n’est plus totalement humain. En réalité il ne l’est plus du tout. Il est dans le mensonge pur de ce qui lui a inculqué la propagande « corporate » de son entreprise. Il est « lobotomisé », on dit « formé » lors de séances ou de sessions de formation très régulières. On lui explique comment vendre, comment faire appel à votre psychologie, quels sont les ressorts de vos choix, ce qui va vous faire acheter ou pas.
Par exemple la culpabilisation fonctionne particulièrement bien.
« Comment ça, vous n’avez rien prévu pour vos enfants en cas de décès » ?
Ben non, rien.
Vous n’avez pas de côté pour eux ? Ben non ! (là vous devez lancer un regard sceptique lourd de sous-entendu mais sans rien dire surtout, il faut laisser faire le poids du silence. Le silence est une arme redoutable)… vous enchainez… « mais vous n’y avez vraiment jamais pensé ? Ben non… vous achevez par un « il serait temps de faire quelque chose »… regard insistant, votre client vous regarde confus… « ben oui peut-être »…
Mais n’oubliez pas, vous êtes un gentil banquier, vous voulez qu’il pense que vous voulez son bien, uniquement son bonheur… pas son pognon, sinon il ne voudrait pas vous le donner. Alors il faut y aller doucement, le pousser délicatement vers l’abattoir mais avec doigté… Bon, je vous propose de vous astreindre à mettre un peu de côté pour vos enfants, disons, 50 euros par mois, qu’en pensez-vous ? « Oui c’est une bonne idée »… bon on va mettre ça sur une assurance-vie, comme ça en cas de décès la fiscalité blablablabla (comme si la fiscalité était un sujet quand on parle de 2% d’intérêt sur 50 euros par mois…).
D’accord vous répond votre client… bon vous devez savoir qu’à coup de 50 euros par mois avant d’avoir une vraie somme à léguer à vos morveux, va falloir une paire d’années ou de décennies… Non je vous fais le calcul mais à ce rythme le gus, il lui faudra douze ans et demi avant d’arriver à 7 500 euros pour un gosse soit 50 000 francs d’il y a longtemps, soit entre vous et moi pas grand chose quand on voit ne serait-ce que les frais de scolarité qui augmentent… si en plus le type en question à 3 gosses, il est évident que ce que vous lui proposez ne sert strictement à rien à part prendre des commissions pour la banque. Mais ce n’est pas comme cela que l’on va évidemment lui présenter les choses.
Bon vous savez, en attendant que la somme que vous serez en mesure de léguer à votre rejeton qui hurle dans sa poussette (parce qu’il a trop chaud dans le bureau du banquier), je vous propose de souscrire à une assurance décès et invalidité, permanente et temporaire (pas le décès… l’invalidité bien sur). Comme ça c’est directement un capital de 20 000 euros qui vous sera versé !! Ca ne coûte que 5 euros pas mois, c’est génial. Quel que soit l’âge ou l’état de santé ? Oui, oui, même pas de questionnaire médical, tenez, signez là… génial et hop, une vente de plus. Vous avez juste oublié de dire à votre « client » que vous venez de l’assurer uniquement en cas de décès accidentel. Il n’est pas couvert en cas de maladie (d’où l’absence de questionnaire médical). Vous omettez aussi de lui préciser que 85% des décès sont liés… à la maladie et pas aux accidents.
Vous n’insistez surtout pas pour lui expliquer qu’en cas d’accident, il est couvert par sa multirisque habitation, par son assurance voiture, par l’assurance de celui qui l’aura, renversé, percuté, tué, ou tout autre raison. Vous venez de faire de la bonne marge…
Voilà comment fonctionnent les banques, voilà la réalité de ce que l’on vous « vend » ou que l’on vous « propose ». Vous ne servez que de contrepartie. Alors parfois, on vous propose évidemment de souscrire à un placement… évidemment sans risque, … évidemment qu’il va rapporter, et évidemment, vous ne lui proposeriez pas « si vous n’aviez pas confiance »… (en termes de techniques de vente cela porte le nom d’appel à la confiance).
Alors votre Luigi, qu’il soit italien, espagnol ou français, il signera dans 90% des cas. Les 10% restant, vous les foutrez dehors parce qu’ils ne rapportent rien…
Lorsque je vous dis qu’il faut débancariser, ce n’est pas une lubie, c’est parce que les banques ne vous veulent pas du bien, c’est parce que dans un contexte de taux négatifs, elles vous feront prendre des risques inconsidérés pour votre épargne, parce qu’aujourd’hui une banque n’est qu’une entreprise commerciale qui cherche à augmenter sa rentabilité à tout prix sur chaque client. Parce que les banques ne sont pas sauvées mais qu’elles sont intrinsèquement fragiles, qu’une nouvelle crise arrive alors que la précédente n’est pas terminée, et que dans celle qui arrive, c’est les clients et les épargnants qui feront les frais des éventuelles faillites ! Sachez-le et prenez vos responsabilités à titre individuel.
En attendant mes chers amis, préparez-vous, il est déjà trop tard !
Charles SANNAT
Insolentiae signifie impertinence en latin
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« À vouloir étouffer les révolutions pacifiques, on rend inévitables les révolutions violentes » (JFK)
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Source Courrier International ici